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- L'autre peut être soi - [Tyssia]
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- L'autre peut être soi - [Tyssia] ─ Mer 22 Nov - 19:19
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    Evalon. Perle d'Eurate pour les uns, fosse à damnés pour les autres. Bordée de par et d'autres de fleuves, il semblait naturel que le lieu devienne une place forte. Elle est aujourd'hui une mégalopole impressionnante. Paysans, artisans, marchands. Bourgeois, nobles ou seigneurs. Ici, tous se mêlent et se démêlent. Ici, l'argent et l'or ne sont qu'une monnaie de substitut. La principale devise n'est autre que le pouvoir. Negocié au coin des ruelles boueuses ou pavées, des infâmes tavernes aux couloirs du palais, tous n'espèrent que s'abreuver de ce rare nectar. Peu cependant disposent d'assez de temps pour le déguster.

    Il faisait beau ce jour là. En plein mois de juillet, le soleil c'était imposé dans tout le pays et particulièrement sur les plaines fertiles qui entoure l'épicentre de l'Empire. Pour tout dire, la journée était agréable. La "ville basse", telle qu'elle était nommée par les habitués, grouillait d'activités. A peine le soleil était levé que les étals étaient dressés. Meme dans les coins reculés, les plus pauvres de la ville, ils étaient garnis et s'étendaient à perte de vue dans un arc en ciel de couleur. Poissons, viandes, légumes. Epées, sabres, marteaux. De quoi satisfaire tout acheteur peu importe ses intentions. De quoi permettre de vivre, ou, de mourir.
    Rian était déjà par le passé intervenu à Evalon. Plusieurs fois. Breves, rapides. Il ne s'était pas attardé en ce lieu. Trop de vie, trop de gens, trop d'yeux, trop de bruits, trop de risques. Trop de pierres, de bâtisses. Trop de trop. Les rues d'Evalon ne faisaient que suivre la géographie complexe du lieu. Parfois larges, souvent étroites. Les axes principaux, eux, étaient par contre d'une incroyable beauté. Personne ne pouvait les emprunter pour la première fois sans s'émerveiller sur le travail méthodique des bâtisseurs, rajoutant, embellissant même, leur propres créations à celle des générations précédentes. Néanmoins, son intérêt pour la pierre et l'architecture n'était pas vraiment poussé. Il ne comprenait pas comment les hommes pouvaient choisir de vivre agglutiner de cette manière, les uns sur les autres, tout au long de leur vie. La, séparés du monde par de solides murs. Séparés de la vie, du réel. Séparés d'eux meme.

    Il était arrivé la veille, avant la tombée de la nuit. Il devait déposer les primes obtenues ce mois ci après avoir rempli trois contrats pour le compte de sa guilde. Le paiement précieusement enroulé dans une étoffe était dissimulé sous son gilet de cuir, qui était lui même sous une longue cape en lin d'un vert foncé, usé par le temps et les intempéries, il se fraya un chemin de l'entrée de la ville jusqu'aux bureaux de sa compagnie. La nuit, Evalon prenait un autre visage. Les effluves d'alcool parcouraient les ruelles, portées par des ivrognes ou des fêtards éméchés. Il se situait à quelques bâtiments du quartier des auberges, celui la meme qui était une fois la nuit tombée conquit par une armée de prostituée au maquillage souvent hasardeux. Bourses vides, regards vides, coeurs vides, elles tentaient malgré tout de paraître sous leurs meilleurs jours. La vie et ses fardeaux.
    Après s'être identifié et déposé son trésor, moins sa part, reçu quelques politesses, son référent qui répondait au nom d'Hector l'invita à se restaurer à l'étage, dans le salon d'accueil. D'autres mercenaires étaient présents dans ce salon pittoresque, se narrant leurs dernières aventures.

    L'esprit de Rian était ailleurs, il c'était juste laissé porté par la nonchalance jusqu'en haut. En vrai, il n'avait pas vraiment faim. La seule chose qui pour lui avait de l’intérêt était de s'en aller au plus vite, non pas sans avoir récupérer quelques ordres de missions avant. Hector c'était vite habitué au caractère de Rian et respectait ses longs silence. Il ne lui forcait la parole que très peu et en profitait  par moment pour soulager son coeur. Au sujet des sa femme qui ne faisait que se plaindre, de ses deux bambins beaucoup trop turbulents, des traites qu'il avait contracté, du pain qui baissait en qualité, de l'arrivée de la Thoréenne devenue noble qui lui demandait beaucoup trop de boulot, de ses douleurs aux extrémités, du manque de bras, de gaillards sérieux... Le regard vague de Rian sembla reprendre vie à l'énoncé de l'arrivée de la noble. Il le coupa dans son monologue, troublé et impatient d'en savoir plus. 

    - " Qu'as-tu dis ? Une Thoréenne ? "

    Habitué à la passivité orale de Rian, Hector fit une mimique de surprise. Comment ? Tu n'es pas au courant ? Pourtant c'est au creux de toutes les chaumières. Mais oui ! La barbare, la sauvage, ramassée par accident, est devenu une petite noble du pays. Si si te dis-je, cette petite crevure qui a passée sa vie à nous attaquer a été propulsée au sommet de la noblesse. Pourquoi ? Bah, il fallait que cette batarde soit en réalité une enfant du pays arraché il y a des décennies. Peu importe qu'elle soit de sang noble, elle est des leurs, jamais des notres. Et puis...

    Rian ne l'écoutait déjà plus. La nouvelle le secoua aussi fortement qu'un uppercut. Il n'en avait jamais entendu parlé, trop occupé à fuir la civilisation. Selon Hector, une soirée avait été organisée pour que tous les nobles du pays puissent l'observer de près, pouvoir grappiller ici et là un échange avec la nouvelle coqueluche de l'impératrice. Rian le coupa encore, faisant fi de toutes ses grossières remarques pour aller à l'essentiel. Plus un ordre qu'une demande, un impératif qu'une supplique :


    - "Je veux faire parti des mobilisés."

    Hector le scruta, un instant, en silence. Ils se connaissaient depuis plusieurs mois mais n'en savait pas plus sur Rian. Beaucoup de mercenaires avaient un passé trouble. La curiosité, bien souvent, n'était qu'un précipice vers la mort. En faite il ne savait rien de lui si ce n'est qu'il était efficace et sur. Hector appréciait le personnage et sa discrétion. Il fit mine de prendre un air grave. Rian ne lui avait jamais rien demandé, plutôt apporté. Au bout de quelques secondes, il afficha un large sourire sur son visage rond. C'est d'accord, Rian, mais seulement si tu promet d'allé troquer ton chiffon vert par quelque chose digne de ce nom, tu comprend Rian, la protection de personnalité demande un certain standing et puis ...

    La nuit, il dormit peu. Taraudé par milles et une question. Comment une enfant de Thor avait pu terminer ici ? Comment survivait-elle ? Comment avait elle réussie à passer des indomptables montagnes à... Ca ? Sans ambiguïtés, Rian fit un transfert de sa propre situation. Depuis qu'il était de retour, une vérité le rongeait de l'intérieur, imprononçable, douloureuse. Il était plus proche du thoréen que de l'euratéen. Plus proche de ces fiers guerriers, farouches et doté d'un instinct de survie qui ferait pâlir le nuisible le plus coriace. En faite il lui était tout simplement impossible de représenter cette femme en tenue de noble. Toutes ces années il les avait observé, vécu parmi eux, sans filtre. S'il n'a jamais été des leurs, il doit à leur enseignement et leur résilience sa propre survie. Il finit quand même par s'endormir, après une longue rétrospection.

    Il se réveilla à l'aube. Il laissa sa cape dans la chambre qu'on lui loua la veille pour trois fois rien et rejoignit la maison de sa guilde. Vêtu de son gilet de cuir, décoré de longs en large par divers poignards et autres instruments de mort, tant pis pour le dressing code, on lui notifia a contre cœur les postes qu'il occuperait pour la journée. D'abord guetteur pour le cortège, puis garde au sein du palais. Parfait. Il voulait la voir, il la verrait. De loin, ça devrait suffire.

    Les seigneurs et nobles finirent par arriver en grande pompes, paradant dans l'avenue qui traçait une ligne droite jusqu'au château. Perché sur le toit d'une banque située parallèlement à l'avenue en question, il observait l'allée en s'aidant de sa main comme d'une visière. Pas de danger à l'horizon, personne en hauteur si ce n'est les autres gardes préalablement identifiés. Tout devrait aller. Comme le voulait la coutume, les invités les plus importants apparurent en dernier. Malheureusement pour Rian, les carrosses qui devaient laisser apparaître la Thoréenne étaient fermés. Il ne vit rien d'elle. Agacé mais sans perdre espoir, il rejoignit le reste de son équipe, déposa son arc par la même occasion et se dirigea vers le palais. C'était la première fois, mais pas le temps de s’émerveiller. Dans l'enceinte du palais son coeur accéléra, resonnant dans sa poitrine jusqu'a ses tympans. Un sentiment de peur et d'appréhension se mirent à prendre forme. A chaque pas, un peu plus. Il suivit silencieusement ses camarades dans un large jardin aux fastes décorations, excédent d'orgueil, de vanité, ou une vingtaine de personnalités papotaient, riaient aux éclats. Cette vue le dégoutta. Ils sentaient mauvais. Une odeur acre d'hypocrisie se dégageait tout autour d'eux. Mais il l'aperçut. A une trentaine de mètre. Elle tenait un arc. Pas de doutes, aucun. C'était elle. Sa posture, sa manière de tenir l'arc légèrement en biais, de concentrer le poids du recul dans ses jambes pour ne pas se laisser déséquilibrer. Positionnement léger, tir rapide. Comme il l'avait vu tant de fois. Viser, tirer, courir. Étudié pour disparaître au milieu des feuillages. Il ne pouvait s’être trompé. Il fut fasciné par l'envol de ses boucles noires au moment de son tir. Sa peau laiteuse reflétait à merveille les rayons du soleil. Elle répondit sobrement par un sourire à un compliment qu'une blonde a la constitution fragile lui adressa. 

    Elle semblait à l'aise parmi eux, à quelques détails près. Elle dégageait une aura qui manquait aux autres. Dangereuse. Oui, elle l'était. Elle connaissait le prix de la vie, le coût de la mort et surement pire encore. Il le voyait dans ses postures, son comportement, ses gestes. Toujours prête. Il le voyait aussi dans son regard, toujours alerte. Rien a voir avec tout ces sang-bleus. Faiblards, inconscients, gavés à la facilité. L'adversité devait leur paraître être une lointaine expression. A vrai dire et à y regarder de plus près, elle n'était pas seulement différente. Elle était sur ses gardes. Par instinct, Rian quitta discrètement ses camarde après avoir fait un rapide décompte des positions de tirs les plus adéquats. Un tour de garde ne lui ferait pas de mal. Sans la quitter des yeux, se faisant le plus effacé possible et restant plus loin que nécessaire, il s'assura que les toutes les précautions avaient été prises. Il s’arrêta sous un des porches de la demeure. Le tour de garde n'était au fond qu'un prétexte pour pouvoir l'observer d'un angle différent. Une acclamation se fit entendre. Un autre de ses cul fourrés apparu, apparemment en retard. Il l'observa quelques secondes comme tous les invités présent. Quelques secondes inattention qui auraient pu lui être amères. Lorsqu'il voulu reposer les yeux sur la thoréenne, elle avait disparue. Ou presque. A l'angle du grand mur qui coupait en deux l'immense jardin, il aperçu une morceau d'étoffe disparaître, de la même couleur qu'elle arborait. Trop tot. Il n'en avait pas assez. Il n'avait rien vu si ce n'est qu'elle était aussi précise qu'un aigle et discrète qu'un chat. Il ne pouvait pas. Poussé par l'obsession d'élucider le mystère de sa transformation, lui qui n'avait pu se débarrasser ces dernières années de ses marques, il prit la même direction. S'assurant ne pas avoir été remarqué il tourna à l'angle. Derrière, plusieurs jardins de roses et de lys, quelques fleurs qu'il ne connaissait pas, aux délicieux parfum. Deux entrées. Une qui donnait sur des escaliers, l'autre vers un hall. En s'approchant d'une des deux il aperçut un petit peu de terre sur la pierre qui servait de marche de séparation entre le jardin et la tour, écouta son instinct, l'emprunta. Il grimpa quelques marches, silencieux, sensibles au moindres bruits. Quelqu'un d'autre, au dessus, les escaladait aussi. 

    Arrivé en haut il s’arrêta au pas de l'entrée, dans son ombre. Osant un regard discret il l'aperçut. Elle était plus loin, immobile dans un long couloir marbré, seule. Son coeur fit un bond. Tendu, il maîtrisa malgré tout sa respiration. Il contrôla sa posture. La plus légère qu'il connaisse, la plus discrète. Talon avant orteils, orteils après talons. Rester une ombre. Posture animale. Comme elle. Dissimulée derrière cette couche d'intégration, il l'a distingué. Ses épaules la trahissait. Toujours prête au combat.

    Elle incarnait ses peurs les plus intimes et à la fois ses interrogations les plus profondes. Une anomalie dans son monde. Il ne la haïssait pas, pas pour ce qu'elle était. Sans réfléchir, il effleura de la paume de sa main un de ses couteaux, comme pour se rassurer, juste au cas ou. La musique, les bruits et les festivités du jardin lui semblait loin, très loin, flous. Elle accaparait toute son attention. 
    Re: - L'autre peut être soi - [Tyssia] ─ Mer 22 Nov - 21:09
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      L'autre peut être soi


      Elle poussa un profond soupire de lassitude alors qu’elle se laissait retomber contre la banquette du carrosse. Puis, elle jeta un regard mauvais à son livre qui reposait non loin d’elle. Apprendre à lire était une corvée dont la jeune barbare se serait bien passée. Depuis que l’impératrice l’avait accueillie, elle avait dû apprendre rapidement tout un tas de choses plus ou moins utile, voir pour certains clairement inutiles. Elle avait la désagréable impression de vivre dans un rêve, ou plutôt un cauchemar dans son cas. Comment était-elle passée d’une vie de liberté et de montagne à une vie de faux-semblant et de pièges ?

      Elle n’avait jamais connu la peur, même lorsque le seigneur avait failli la tuer, mais face à ce monde hostile elle commençait à comprendre ce que cela pouvait être. Ce n’était pas son genre de s’apitoyer pourtant. Elle devait s’y faire, on lui avait pris une vie pour lui en offrir une autre. Les règles, elle devait les apprendre vite et composer avec ses données si elle voulait survivre. C’est du moins ce qu’elle pensait tandis qu’une de ses mains glissait instinctivement contre ses jupes pour vérifier si son poignard se trouvait toujours à sa place. Ce simple constat la rassura grandement alors qu’enfin elle pouvait apercevoir les immenses murs blancs de la cité.

      C’est au château de son hôte qu’elle serait montrée tel un animal sous prétexte de montrer son talent au tire à l’arc. L’idée la rebutait, bien que depuis l’incident de la chasse aux oiseaux, elle avait pris conscience que la protection de l’impératrice dépendait surtout de l’intérêt qu’elle lui apportait. Finalement, la porte du carrosse s’ouvrit et elle prit la main du cocher pour qu’il l’aide à descendre dans la cour ou déjà une marée humaine l’attendait. Elle n’eut plus à partir de cet instant aucun moment de repos ou de solitude jusqu’à tard dans la nuit ou enfin elle put rejoindre sa chambre. Malheureusement, même là, elle ne trouva le sommeil que bien plus tard…

      Elle fut réveillée bien avant la venue des servantes et comme à son habitude, elle s'était habillée seule refusant la tenue qu’on lui avait choisie. Comment voulez-vous tirer convenablement dans ses robes ou une simple expiration relevait d’une extrême concentration. Elle avait donc mis une veste en velours noir brodé ainsi qu’un pantalon de même couleur, le tout tenu par une large ceinture de cuir et enfin elle avait enfilé de longues chausses. Lorsqu’elle vit l’effarement des servantes, elle ne put retenir un petit sourire de satisfaction.  Puis, elle ferma son esprit et entama cette longue journée où elle ferait semblant d’être comme eux.

      Ce n’est qu'après sa démonstration que le vernis s'effrita. La nausée et le besoin de fuir… C’est d'ailleurs ce qu’elle fit sans vraiment y penser. Elle avait besoin de solitude et de s’éloigner de tout ce monde. Instinctivement elle chercha à rejoindre sa chambre, mais elle sentait le danger au bout de quelques volés de marche elle comprit qu’elle était suivie… sa main se glissa pour récupérer son poignard avant de s’immobiliser les sens aux aguets…

      Elle ferma les yeux, se concentrant sur celui qui se tenait non loin dans son dos. La respiration, les pas, le changement imperceptible de l’air… La peur… La sienne ? Celle de son poursuivant ? Elle resta tétanisée la lame entre ses mains. Quelques choses ne va pas, mais quoi exactement. Elle compte mentalement, le temps de rassembler ses esprits et de se décider. Puis doucement sa voix résonna dans le couloir avec cet accent caractéristique de ses montagnes natales.

      -Ami ou ennemi ? Tuer dans le dos est lâche… Permettez-moi de faire face…

      Lentement, elle se tourna pour poser un regard sans haine et sans colère sur l’homme. Toutefois, elle ne chercha pas à cacher l’arme qu’elle tenait contre sa cuisse, la lame vers le bas. Bien qu’elle ne puisse pas le distinguer, elle plissa ses yeux et s’avança de quelques pas pour tenter de voir celui qui l’avait suivit ici.



      Re: - L'autre peut être soi - [Tyssia] ─ Jeu 23 Nov - 14:33
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        Elle resta figée, un long moment. Un trop long moment. Rian ne l'avait pas quitté des yeux, mais son immobilité l'alarma. Que pouvait-elle donc bien faire, ainsi, à attendre le sort du Destin dans ce couloir ? Il tentait de percer à jour sa manigance en observant les contours de son corps et les tensions qui le traversaient. Sans succès. Avec concentration, néanmoins, il distingua le ralentissement de sa respiration. Ses muscles dorsaux, suivant l'inspiration et l'ouverture de sa cage thoracique, ont rapidement perdus en intensités. Elle contrôlait son rythme cardiaque, son souffle. Cela prit quelques dixièmes de seconde à Rian pour comprendre qu'il était très probable qu'il fut démasqué. Que faire ? S'enfuir avant qu'il ne soit trop tard ? Oui. S'enfuir. Maintenant. Avant qu'il ne soit forcé de se confronter. Au fond, il ne savait rien d'elle. Seul son imaginaire avait fixé la noblesse de son caractère. La réalité pouvait être toute autre. Et si, elle était vraiment devenue une des leurs, Rian serait châtié de la pire des façons pour avoir de manière si cavalière approché sans autorisation une personne de telle importance. Il pourrait rapidement être accusé de tentative de meurtre, ou pire, pour finir le restant de l'Eternité à partager la même fosse putride que celle destinée aux brigands, bandits et autres crapules innommables. L'image le frappa. Il allait faire demi tour. Mais une voix retentît, résonnant contre chaque paroi vergetées et polies du corridor.


        - Ami ou ennemi ? Tuer dans le dos est lâche… Permettez-moi de faire face…

        Il se figea, encore. Il ne pouvait plus partir, déjà, elle s'était retournée, lui faisant face a quelques mètres. Son oeil marqua la dague. Longue, acérée. Elle avait été soignée dans l'attente d'un tel jour. Préparée et chérie pour accomplir son funeste destin. Elle le fixait de ses grands yeux bleus, sans ciller, sans crainte. Il n'y avait pas d'hésitation. Quoi qu'il arrive, elle accepterait son sort. Mais elle osa un pas, pour raccourcir la distance qui la séparait de Rian. Sans attendre plus longtemps il dégaina un poignard de sa ceinture et serra son manche en son poing, la lame suivant la courbe de son avant bras. Il fit un pas en arrière, sortit de l'ombre. Elle s'approcha encore. Il recula cette fois de deux pas. Son coeur frappait durement dans sa poitrine. Ami ou ennemi ? Il n'en savait pas plus lui-même. L'appréhension d'un combat dans un endroit aussi exiguë grandit en lui. Il ne pût s'empêcher de calculer rapidement les avantages de chacun. Il était équipé légèrement, elle aussi. Les courtes lames étaient toujours préférables aux longues dans ces situations. Il était fin, elle l'était aussi. Merde, si du sang devait couler, se serait par la main de celui qui saisirait en premier l'avantage. Merde. Il ne l'avait pas. Lui, hésiterait. Encore, merde.

        Son regard n'avait rien de belliqueux il semblait même apaisé. Différents de tout à l'heure, dans le parc, ou l'inquiétude brillait au fond de ses iris. L'enfant de l'Echine, tel qu'il l'avait identifié par son accent, semblait moins craindre les assassins que les ombres qui la guettaient jours et nuits au sein de ses immenses murailles.

        A nouveau, elle fit un pas en avant. Rian recula, cette fois de deux pas. Adopta une position de défense. Appuyé sur sa jambe gauche, celle de droite en avant, la lame bien tenue dans sa main droite. Semblable à un fauve, prêt à répondre aux coups par des coups, dans une terrible danse mortelle. La lame cependant n'était pas pointé dans la direction de la femme aux cheveux de jais. La fenêtre qui donnait plein nord laissait entrer un halo de lumière dans la pièce. En reculant, le rayon frappa le visage de Rian de pleins fouet. La douleur ne lui laissa pas d'autre choix que de porter sa main libre à sa tête pour couvrir ses yeux. Grognant légèrement de douleur il se réfugia encore en arrière. Gagner du temps, désamorcer, ou combattre, à ses risques et périls. Au fond, il ne le voulait pas. Tant pis, il fallait oser. De toute évidence c'était la seule alternative à un échange létal. Tout en se réfugiant en arrière par de légers pas, il prit enfin la parole après de longues minutes écoulées, depuis l'interrogation qu'on lui avait lancé. Dans un thoréen plus qu'acceptable, il lui répondit enfin :

        - " Nos lames n'ont pas à se rencontrer aujourd'hui, enfant des montagnes.. "

        Comme une invitation, il rétracta légèrement son bras qui était resté tendu. En son for intérieur résonnait son anxiété. N'attaques pas Thoréenne, n'attaques pas... Nos vies ne doivent pas se terminer ainsi, il reste bien trop à faire. Fou aurait été celui qui sous-estimé ses capacités martiale. Elle était plus capable que beaucoup c'était évident. Ne parvenant pas à clairement lire les intentions de la jeune femme, Rian ne pouvait que rester sur ses gardes, jusqu'à ce qu'elle scelle leur sort, à tout jamais.
        Re: - L'autre peut être soi - [Tyssia] ─ Ven 24 Nov - 15:02
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          L'autre peut être soi


          De toute évidence, il ne s’agissait pas d’un noble, ni d’un citoyen lambda. Faussement, calme aux premiers abord et prêt à bondir tel un chat sauvage. Elle aurait dû s’arrêter d’avancer quand il mit plus d’espace entre eux, mais elle éprouvait le besoin de voir le visage de l’homme. Puis elle se stoppa net en le voyant prendre une posture de défense. La lumière éclaira enfin ses traits un brefs instants, mais elle y reconnut l’attitude de l’animal acculé… C’est pourtant lui qui l’avait suivi et il avait peur, pourquoi ? Était-il venu, comme beaucoup d’autres avant lui, pour approcher la barbare ? Jouer à taper contre les barreaux d’un animal qui ne pouvait pas répondre ?

          Ses yeux passèrent de son visage à sa lame le temps qu’il ne recule encore plus, se cachant dans l’ombre du couloir. Était-ce elle ou la lumière du jour qu’il fuyait ainsi ? Elle hésita entre la colère et l’envie de disparaître. Une légère moue étira ses traits un bref instant qui disparu au moment où l’inconnu ouvrit la bouche. Ses yeux s’arrondirent de surprise  et ses lèvres tremblèrent. La langue des montagnes dans la bouche de l’homme avait un son chantant et le goût de la nostalgie pour celle qui n’avait plus le droit de l’utiliser. Oh, comme entendre ses accents lui avait manqué ! Une boule se forma dans sa gorge et ses yeux menacèrent largement de briser ses barrières. C’est elle qui maintenant recula pour profiter de l’ombre cachant le trouble qu’il venait de provoquer.

          Respirer lentement. Garder le contrôle et ne rien montrer. Sa main pourtant trembla, lui rappelant l’arme qu’elle tenait. Elle n’avait plus de colère, ni envie d’attaquer. Son arme disparue dans les replis de sa tenue. S’il avait voulu la tuer, il aurait déjà agi, mais cela n’expliquait pas ce qu’il voulait. Elle montra lentement ses deux mains vides. Non, il n’avait pas à se battre pour le moment. Elle en profita pour le dévisager un long moment en silence. Ses cheveux, sa barbe, sa tenue ainsi que sa posture, tout cela passa à son analyse. Malgré la curiosité qu’il avait su réveiller, elle n’en demeurait pas moins méfiante. Comme les animaux, il y avait en lui cette aura dangereuse et imprévisible, pourtant si familière à Tyssia.

          Puis brutalement, elle se referma, se redressant de toute sa taille. Un réflexe qu’elle avait acquis depuis qu’elle devait fréquenter ce monde hostile aux règles incompréhensible. Il avait touché de prêt sa faiblesse, le manque de sa vie très certainement sans le savoir. Tant pis, il prendrait pour ses derniers mois de frustration. Elle murmura d’une voix douce et acide dans sa propre langue.

          - Est ce que la sauvage est convenablement muselée ?



          Re: - L'autre peut être soi - [Tyssia] ─ Sam 25 Nov - 15:55
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            Le silence était lourd, l'atmosphère pesante. Rapidement néanmoins, la tension se dilua à travers le long couloir, remplacée par un mutisme d'incompréhension partagé. Elle d'abord. Lorsque les sons emphatiques bien propre à son peuple quittèrent la gorge de Rian pour résonner dans les oreilles de la brune. La réaction fut immédiate. Stupéfaite, presque sonnée par ce qu'elle venait d'entendre, son visage se liquéfia un instant. A travers son regard opale, Rian pouvait distinguer plusieurs émotions se mêler et s'entrechoquer en elle. La surprise, l'incompréhension. La joie... Ou la tristesse. Dur de distinguer entre ces deux derniers. Ses yeux semblèrent se voiler d'une fine couche humide, mais la dame ne perdit pas de sa superbe pour autant. Elle recula, peut-être pour laisser à Rian assez d'espace pour se sentir serein ou pour dissimuler son trouble. Il n'était pas aisé de comprendre l'originaire des montagnes. Tant dans ses réactions que dans son histoire. Malgré ce premier contact, le mystère demeurait et semblait s'épaissir. Rien n'était clair. Son regard transpirait de fierté et de courage, elle aurait pu l'attaquer, elle l'aurait peut être même fait avec joie, motivé par un espoir mortifère, ou juste par nostalgie des beaux jours. Pourtant, son corps trahissait autre chose. Une chose que Rian ne parvenait toujours pas à identifier.

            Il suivit chacun de ses mouvements, sans cligner une seule fois des yeux, avec attention. Elle recula d'abord, dissimula sa dague sous ses vêtements dont la qualité apparente ne pouvait tromper sur le rôle qu'elle incarnait, au milieu de ces gens. En comparaison, Rian pouvait passer pour un paysan à peine sorti des bois. Si la qualité de ses armes était excellente, tout comme celle de son gilet de cuir, il semblait bien négligé. Qui était finalement le sauvage d'entre eux deux ?

            Il finit par baisser son bras, dans une suite de mouvement qu'il semblait avoir répété des dizaines de milliers de fois. Son arme regagna son étui dans un frottement caractéristique, celle de l'acier contre le cuir, très proche soit dit en passant de ce que susciterait une lame cherchant son chemin après avoir traversée une peau, s'épanouissant au milieu des organes de sa victime. Le fait que la nouvelle coqueluche du pays ait montrée patte blanche le rassura. Elle était de son avis, ils n'avaient pas à être ennemi aujourd'hui, en ce lieu, à cet instant.

            Pourtant, elle se renfrogna rapidement. Par fierté ou par défi. Par honte ou par habitude ? Rian n'en savait rien. Il était plutôt bon pourtant, dans l'analyse des autres. Sa réaction n'était pas attendue. En fait, rien de cette journée n'aurait pu être prévu ou attendu. Mais il possédait la patience et la résilience de la roche et les quelques marches contre lesquelles il pouvait éventuellement buter sur la route de la compréhension ne l'arrêterait pas. Il en avait besoin. Comme quelque chose de vital, d'essentiel. Sans trop savoir pourquoi, cette courte entrevue avait laissée apercevoir une chose qui s'inscrivit en lui, profondément. Il se voyait en elle, plus encore maintenant, sans trop savoir pourquoi.

            - Est ce que la sauvage est convenablement muselée ? 

            Pourtant maître de lui-même, l'incompréhension apparut sur son visage. Sa tete pivota de quelques degrés comme si, en changeant d'angle, il apercevrait quelque chose d'autre. Pour qui est-ce qu'elle le prenait ? Etait-ce le mépris qui ruisselait de cette voix, à la fois satinée et condescendante ? Le comparait-elle à tous ces anémiés en manque de sensations, de vie, de colère. En manque de raison ? L'idée d'être à tel point mésestimer, après tous les efforts fournis pour l'approcher le dégoûta. La colère résonna dans son ventre. Sourde, muette, il l'étouffa. Tout comme la curiosité qui le dévorait. Comme l'incompréhension du choix de ses mots. Au fond, pourquoi c'était-elle comparée à un chien ? Pourquoi c'était-elle, par elle même, définie muselée, attachée, comme un animal. Pourquoi ses pas étaient si légers et si lourds, ses yeux si avides d'une autre horizon et si tristes. Peu à peu, la colère laissa place à l'empathie. Sans vraiment réussir à lui répondre, il osa un pas. Puis un autre. Il s'approcha d'elle tel un chat qui s'assurait après chaque progression qu'il ne risquait rien. Le temps semblait pour lui s'être arrêté. A deux mètre d'elle il s'arrêta, comme piqué par la révélation. Il venait de comprendre. Tout ces simagrées, cette fausseté qui le perturbait depuis qu'il l'avait vu, il venait de comprendre. La dame était comme lui, il fut un temps. Pas si lointain. Elle survivait. Non. Elle subsistait. Du mieux qu'elle pouvait. Prisonnière elle aussi. Pas de fers, pas de cages. Pas de chaines ni de cordes. Ses entraves semblaient différentes et pourtant, à cet instant, c'était comme s'il les voyait, peser sur son dos, de tout leurs poids, de toutes leurs lourdeurs. Le fardeau du captif.

            Il reconsidéra sa position, un court instant. Bien qu'il lui était étrange et indéchiffrable pour lui d'imaginer une telle forme de détention il était sûr de lui, convaincu. Comment pouvait-il se tromper alors que durant si longtemps il avait lui-même du se décorer, se parer de ce qu'il devait être plutôt que de ce qu'il était, jusqu'à ne plus faire qu'un avec la seule entité qui lui offrait une issue possible. Eurate n'avait finalement que peu à envier aux hommes de l'ouest. Il lui fallait quand même comprendre. Pourquoi ? Etait-elle vraiment condamnée à observer les oiseaux danser dans les cieux, de sa cage dorée ? Avait-elle seulement essayée de briser ses barreaux ? 

            - " Pourquoi ? ... "

            Il n'avait même pas contrôlé ses mots qui s'étaient échappés d'entre ses lèvres. En réalisant que sa question n'avait aucun sens, il la précisa, lui donna forme, après une courte pause qui lui laissa le temps de mieux formuler sa pensée :

            - " Pourquoi tu as l'humiliation d'etre asservie ? "

            Les subtilités grammaticales de sa langue de substitution ne lui étaient pas acquises, mais c'était assez pour être compris par n'importe quel Thoréen.
            Re: - L'autre peut être soi - [Tyssia] ─ Dim 26 Nov - 15:13
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              L'autre peut être soi


              Malgré son air hautain, elle était consciente des battements beaucoup trop rapides de son pouls. Elle regrettait maintenant d’avoir rangé sa lame, décrétant brutalement l’inconnu trop dangereux pour son équilibre mental. Son regard appuyé qui semblait chercher à comprendre ce qu’il voyait la perturbait et instinctivement ses propres yeux cherchèrent dans le couloir une issue par où fuir. Malheureusement en s'approchant d’elle il s’était mis entre elle et la seule échappatoire de Tyssia. Elle ne pouvait sortir sans combattre ou tout du moins le bousculer. Pourtant même si la panique menaçait de l’envahir, une autre partie d’elle ne pouvait se résoudre à terminer soudainement cet échange. Elle aussi voulait comprendre…

              Vivement elle chassa ses divagations, l’observant s’approcher à nouveau à la manière d’un félin s’assurant du terrain. Se respiration se suspendit le temps qu’il s’arrête bien trop prêt à son goût. Reculer ! Elle avait beau y songer, son corps se refusait à lui obéir. C’est finalement ses mots qui brisèrent l’enchantement qui la retenait passive face à lui.

              Pourquoi ? Il n’avait pas besoin d'expliciter d’avantage, elle avait étrangement compris ou tout du moins pensait-elle avoir compris le sens de sa question. Elle avait le sentiment profond qu’il pouvait à son tour comprendre ce qu’elle pourrait répondre… Un grondement sourd s’échappa subitement de sa gorge alors qu’elle prenait conscience qu’elle lui en voulait. Il avait fallu qu’il apparaisse maintenant, qu’il la trouble, qu’il lui rappelle douloureusement qu’elle n’avait plus sa place nulle part. Il avait réveillé cette sensation de solitude qui accompagnait chacun de ses pas et l’envie de pouvoir partager son fardeau… Cette faiblesse, il fallait qu’elle lui fasse payer.

              La suite elle ne la réfléchit pas et réduit l’espace entre eux pour le saisir au col et l’amener plus près. La colère et la détresse se dispute un court instant la place sur son visage. Elle avait dans un premier temps voulu le frapper, l’obliger à repartir. Mais finalement, maintenant qu’il fût si proche c’est elle n’était plus sûr de rien… Finalement, c’est un murmure en Thoréen qui sort de ses lèvres légèrement tremblantes.

              - Sais-tu ce que c’est que de n’avoir sa place nul par ? Qui es-tu toi qui parles la langue des montagnes ?

              Ses yeux avisèrent le champ libre vers la porte et se contrèrent de nouveau sur l’homme avant de le relâcher aussi soudainement qu’elle l’avait agressé. Finalement, elle ne voulait pas savoir, elle avait mal et peur tout ça part sa faute. Elle fait demi-tour et se réfugie vers la sortie. Ne se souciant pas des larmes qui roulaient sur ses joues pour la première fois depuis tellement longtemps, qu'elle en avait oublié ce qu'était des larmes.




              Re: - L'autre peut être soi - [Tyssia] ─ Lun 27 Nov - 18:53
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                La scène pris une tournure inattendue. Les rôles semblaient s'échanger et se partager, se croiser et se saluer. Lorsque Rian était prêt à bondir, la jeune femme restait de marbre. Et tandis que ce dernier semblait serein, elle, semblait prête imploser, dissimulant en son fort un cocktail si volatil que la moindre étincelle suffirait à incendier. Cette étincelle, sans le désirer, il la provoqua. L'être calme se transforma en une tornade d'émotions, en quelques instants à peine, sans le moindre signe avant coureur. Elle le saisit par le col, violente. L'approcha. Grogna. Virulente. Ses yeux imprégnés de colère s'injectaient doucement de sang, tandis qu'ils brillaient d'un feu cobalt dans lequel se reflétait ses peines et se consumé ses rêves. Espoirs cendrés. Désirs calcinés. Par ceux qui l'ont conduit à sa misère existentielle. Par ceux qui ont laissé faire. Ceux qui ont regardés, qui se sont exclamés, qui se sont moqués. Les bras ballants le long du corps, muet, Rian se laissa secouer. Il n'avait pas à résister, il n'aurait pas pu. Le mérite revient à la dame et à sa capacité à encaisser sans rendre. Quelques mots, glissés faiblement. Ils le clouèrent. Au sens littéral. 

                Elle finit par le lâcher. Plus frustrée qu'apaisée. Le dépassa. Les yeux scotchés devant lui, Rian était renvoyé à ses propres démons. Oui, il le savait. Oui. Ne pas avoir de place. Ni ici, ni là bas. Ni ailleurs. Sans famille, ni amis. Seulement des cadavres dans un sillon poisseux. Aucunes attaches, aucunes attentes. Il savait ce qu'était une vie sans foyer. Toutes ses innombrables nuits a tourner en rond, plus blanche que nuit, à creuser de nouveaux sillons par d'incessants allers retours. Causer aux étoiles, seules confidentes. Hier encore. Oublier comment vivre, rapprendre. Devoir omettre, rapprendre encore. Souhaiter aller de l'avant mais être irrémédiablement tiré en arrière par quelconque force obscure. Et puis, elle s'en allait, le bruit de ses pas le confirmaient. Émerges, abruti. Dis lui.


                - " J'étais Ryan, du peuple d'Eurate... "

                Il ne se dégageait que très peu d'assurance à travers sa voix rauque. Un noeud dans sa gorge avait prit forme. Son démon s'y refusait. Ne te confies pas, ne donne pas d'armes contre toi. Tant pis pour le reste, nous nous suffisons.

                - " J'etais Rian, captif de Jagar Broies-les-Os... "

                Il restait à fixer le mur, défouloir psychologique du tsunami d'émotions qui le submergeait. Rester concentré sur un point persistant lui permettait de ne pas se noyer dans sa propre douleur.

                - " J'ai arrosé ma liberté de son sang... Je ne suis plus que Rian. "

                Il conclut dans sa langue natale, délaissant le Thoréen sans l'avoir même remarqué, l'écho de la pièce l'en informa. Il ne savait comment mieux formuler sa phrase. Préciser ce paradoxe qui le torturait. Il n'était qu'un enfant. Le genre qu'on pose à un endroit et qui fait ce qu'on lui demande, sans se poser de question. Sa soif de liberté grandit en même temps que lui. Sa colère se forgea dans les braises et la glace. Pour au final la gagner. A quelle fin ? Il n'y en avait pas. Peut-être avait-il espérer naïvement retrouver ses souvenirs d'enfance. Devenu trop sauvage pour son monde natal, pas assez pour celui auquel il se substitua, il était en quelque sorte une chimère d'entre deux, ratée. Alors, si. Il savait. Ne plus avoir de place nul part, il connaissait. 

                Il se mit à tourner doucement sur lui même, enfin décidé à abandonner de vue la façade du mur pour faire face à la barbare devenue noble qui se tenait alors au plus près de la sortie. Si sa voix avait quelque peu flanchée à un quelconque moment, son visage, sans être fermé, n'exprimait rien de plus. 
                Re: - L'autre peut être soi - [Tyssia] ─ Mar 28 Nov - 18:48
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                  L'autre peut être soi


                  Elle ouvrit la porte, sur le point de bondir hors du couloir et loin de lui. Sa voix pourtant, figea son corps dans son élan. Il n’avait pas élevé le ton ni fait ressentir de la colère, mais ses mots l’avaient percuté de plein fouet, aussi durement qu’un coup réel. Ce qu’il était son esprit mis un long moment à l’accepter… Elle le savait malheureusement mieux que quiconque que cela faisait partie des pratiques Thoréenne. Ils en étaient tous deux la preuve vivante. Les faces d’une même pièce, ce que chacun aurait pu devenir… Sa main lâcha la poignée pour se tourner lentement. Lui faire face à nouveau sans savoir quoi dire. S‘attendait-il à des excuses ? Alors que finalement elle comme lui ? Lui au moins était-il libre de ses gestes, de ses pensées et de ses paroles. Que disait-on dans ces cas là ?

                  - Rian c’est mieux que rien du tout…

                  Ses idées n’étaient pas très claires et elle avait l’impression de voir trouble, toujours inconsciente des larmes qui barbouillaient ses joues. Elle hocha la tête au fait qu’il ai tué l’homme qu’il l’eût kidnappé, n’avait elle pas tué son faux père lorsqu’elle avait découvert la vérité ? Une vie pour une vie, il n’y avait rien d’illogique à cela. Cela n’expliquait toujours pas ce qu’il avait voulu en la suivant ici. Elle fit un pas vers lui, puis un autre ayant abandonné l’idée de fuir. Les géants ne l’avaient de toute façon pas mis dans cette situation pour rien.

                  - Vous l’avez tué, c’est bien…. Qu’est ce que vous espérez en venant à moi ? Je ne suis pas ceux des montagnes, je ne peux pas m’excuser à leur place pour vos souffrances…

                  Elle ne pouvait pas, vraiment ? N’avait-elle pas participé quelques fois à ce genre de rapt en pensant que s’était normal ? Devant cet homme, elle comprit à quel point elle avait eu tort. Encore aujourd’hui elle avait tendance à accuser les Euratien de ses malheurs. Ses lèvres se pincèrent durement en pensant qu’elle était certainement injuste. Il ne faisait qu’accentuer le trouble qu’elle ressentait, faisant s’ébranler ses certitudes par sa simple présence.

                  Des bruits de pas résonnèrent non loin de là, lui faisant tourner la tête dans cette direction. Certainement dame Clothilde envoyée la récupérer pour le repas. Elle ne réfléchit pas et attrapa la main de l’homme et le tira jusqu’à la porte qu’elle avait voulu emprunter un peu plus tôt. Elle le poussa sans ménagement dans la chambre. Sa chambre. Elle referma la porte s’adossant dessus, posant son index sur ses lèvres, lui intimant le silence. Il ne fallut pas une minute avant que la fameuse Clothilde ne frappe à la porte pour réclamer la présence de Tyssia en bas. Elle resta un instant sans rien dire puis prit la parole.

                  -Je suis fatiguée, je reste me reposer…

                  Un nouveau silence avant que finalement les pas ne fassent demi-tour.




                  Re: - L'autre peut être soi - [Tyssia] ─ Mer 29 Nov - 15:18
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                    "... Qu’est ce que vous espérez en venant à moi ? Je ne suis pas ceux des montagnes, je ne peux pas m’excuser à leur place pour vos souffrances…"


                    Des excuses ? Etait-ce du sarcasme ou du mépris ? A l'entente de ce mot son visage se ferma instantanément. Une flamme, naissante, luisait au creux de ses iris. Qu'est-ce qu'elle pouvait bien croire, qu'il était parvenu jusqu'ici pour se faire rassurer ? Rian était un parangon de fierté. L'idée même d'être rabaissé par ce genre de perception le révulsa intérieurement. Il avait eu tort. C'était devenu clair, il n'aurait jamais du s'aventurer aussi loin en territoire inconnu. Il n'aurait jamais du ouvrir, partager, cette boite aux souffrances qu'il avait scellé avec application. Tant que le soleil continuera de se lever, tant que le temps persistera à s'écouler, personne n'aurait droit, consciemment ou non, de le traiter de manière si misérable. L'orgueil meurtri par une simple phrase, il était temps de reconsidérer le bien fondé de cette rencontre. 

                    Cependant, avant qu'il n'ait eu le temps de faire quoi que ce soit, des bruits de pas leurs parvinrent. Quelqu'un grimpait les marches qu'ils avaient tout deux précédemment empruntés. Alors qu'il cherchait encore une solution en observant le long couloir, ses issues, ses fenêtres perchées sans savoir quel cachette serait la plus pertinente, elle le saisit. Tout en le repoussant de force vers une pièce, large et décorée, raffinée, elle referma la porte derrière eux. Silence. Les pas s'approchèrent de la porte, ils échangèrent. Rian compris qu'il était dans la chambre de celle qui l'y avait entraîner. L'idée l’impressionna. C'était la première fois qu'il pénétrait comme ça, dans l'intimité de quelqu'un d'autre. Il luttait contre lui même pour ne pas se mettre à détailler la pièce afin d'en savoir plus sur la jeune femme. Après tout, un endroit aussi privé ne pouvait être qu'a l'image de son possesseur. Sauf lorsqu'on se nommait Rian. 

                    Il réalisa que la barbare nouvellement anoblie avait pleurée. Les traces de larmes se terminait par une fine perle, près de son menton, qui refusait de disparaître. Il ne l'avait jusque la pas réalisé et cette vision le troubla légèrement, sans trop savoir pourquoi. Pas assez pour décolérer malgré tout. Lorsque enfin la femme s'en alla et après avoir persisté dans le silence un instant pour s'assurer qu'elle soit hors de portée de voix il reprit la parole. 

                    - " Est-ce je donne l'impression d’être aussi pitoyable ? Me prends tu pour un animal apeuré, à la recherche d'un maître ? "

                    Les excuses et les plaintes étaient du ressort des faibles. Tout ceux qui ne pouvaient se résoudre à avancer sans la reconnaissance de leur souffrance. Rian n'en avait que faire. Il n'en avait à proprement parler rien à foutre. Rien à foutre qu'elle fasse partie d'eux, encore ou non. Rien ni personne ne saurait capable de lui donner des excuses. Pas même s'il trainait chaque Thoréens dans la boue. Pas même s'il les dépecé tous, qu'il les traqué, dans une pluie de sang ou personne ne saurait éviter les gouttes. La vie était telle qu'elle était. Avec ses fardeaux. Soit on les portait soit on se laissait écraser. Rien ne s'estompait. Vivre avec ou périr. Tout ça ne lui faisait plus ni chaud ni froid. Il avait depuis longtemps oublié comment faillir, comment se laissé porter par les flots de l’échec. Pétri pour mourir debout. Forgé pour affronter. Survivre ou perdre. Concept simple, croyance binaire. Tete haute, torse gonflé, son langage corporel avait changé. 

                    - " Je ne suis pas venu mendier ta pitié. Je n'étais pas venu pour échanger. Seulement te voir... Il marqua une courte pause pour sélectionner de la meilleur des façon les mots qui suivront. Juste t'observer. Pour apprendre. "

                    Curiosité malsaine. Il regrettait. Il se détourna d'elle, lui donnant son dos. Une fenêtre au fond de la chambre donnait sur le jardin de fleurs qu'il avait aperçu lorsqu'il l'a suivi. Il les admira avec attention. Les lys étaient magnifiques. Entretenus et soignés. En échange de contrôle. On contrôlait leur évolutions, leurs croissances, leurs reproductions. Comme lui auparavant. Mais aujourd'hui, il était devenu aussi sauvage que ses chardons poussant au fin fond des forets. Et elle, était-elle semblable à lui, ou à ce magnifique jardin ? Il ne se retourna pas pour s'adresser à elle. C'était mieux ainsi :

                    - " Je vois en toi ce que je sens en moi... Je n'arrive pas à le comprendre. Pas à l'expliquer. Alors réponds moi, femme. As-tu perdu ton chemin ou le bâtiras-tu au dessus des carcasses de ceux qui tenteront de te museler ? "

                    Il avait choisis avec soin ce terme, qu'elle avait usé plus tot. Pour lui faire comprendre qu'elle l'était, ici, au milieu de tout ces gens. Qu'il n'y était pour rien et que rien au monde ne l'aurait fait apprécier une telle hérésie. Lui faire comprendre qu'il ne tenait qu'à elle de choisir. Vivre comme ces fleurs. Ou survivre telle qu'elle était réellement. Si tant est qu'elle n'avait pas déjà fait son choix. Peut-etre, au fond, c'était-il fourvoyé à propos de cette femme. Et qu'ils n'avaient en communs qu'une situation plus ou moins proche, à un moment donné, à un instant, dans leur vies. Rien de plus. 
                    Re: - L'autre peut être soi - [Tyssia] ─ Mer 29 Nov - 19:52
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                      Ils restèrent un long moment à s’observer dans un silence pesant. Silence qu’il brisa le premier par des mots qui la laissèrent tout d’abord déconcertée. Ses sourcils se froncèrent et ce fut son tour de pencher la tête à la recherche d’un angle qu’elle pourrait comprendre. Qu’est-ce qu’il s’était imaginé ? Qu’elle allait traiter de faible une personne qui aurait pu engager le combat avec elle dans le couloir et le gagner ? Elle se contenta finalement de soupirer agacée en secouant ses boucles brunes. Décidément, les Euratiens étaient bien trop compliqués pour elle. Elle qui avait vaguement imaginé qu’il pourrait être une personne avec qui elle aurait pu… Elle chassa ses pensées avant même qu’elles ne prennent vraiment forme dans son esprit.

                      C’était beaucoup trop en peu de temps pour qu’elle ne supporte son ton mordant. S’il était agressif qu’il ne s’attende pas à ce qu’elle reste tranquille. Ah, ça non ! Elle n’était pas une de ses femmes de la cour qui tournaient de l’oeil dès qu’un homme haussait le ton. Elle avait connu bien pire. Elle posa ses poings sur ses hanches sentant la moutarde lui monter au nez. Finalement lorsqu’il lui tourna le dos, la colère l’enflamma instantanément. Pour qui se prenait-il à la fin ! Il voulait apprendre et bien il en serait pour ses frais ! Elle grogna à nouveau avant de prendre la parole sans chercher à se faire discrète.

                      -Tu exiges des réponses ? Mais qui es tu pour te permettre de les poser et d’ailleurs fais moi face, le mur n’est pas doué pour répondre !

                      Soudain en regardant son dos, une des réponses qu’elle cherchait elle-même la frappa. S’il était vrai qu’il était comme elle alors peut-être que…. Non, il n’était pas des montagnes, mais suffisamment sauvage. Comme un renard ou un loup. Oui c'était cela ! Elle expira lentement et haussa un sourcil.

                      -Tourne toi et fais moi face ou bien es-tu finalement un lâche comme tous ses hommes dehors attendant que je ne donne que les réponses que l’on est capable de supporter ? Tu voulais me voir non ?

                      Un léger sourire se dessina sur ses lèvres.

                      -Je suis Tyssia Novigrad ou Tyssia d’Opale qu’importe… Je ne sais peut-être plus qui je dois être, mais je sais ce que je ne veux pas.

                      Elle attend un instant observant son dos, se demandant s’il allait passer par la fenêtre ou s’il allait l’affronter. Elle commençait à voir se dessiner une certitude, mais elle ne voulait pas y croire pour rien. Elle finit par reprendre d’une voix plus douce qu’elle ne s’y attendait.

                      -Et toi as tu perdu ton chemin ?

                      Elle se contracta prête à recevoir sa colère sa fierté et tout ce qu'il ce qu'il était prêt à partager sans plus se demander pourquoi. Elle avait simplement accepté l'homme comme son autre...



                      Re: - L'autre peut être soi - [Tyssia] ─ Jeu 30 Nov - 18:31
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                        -Et toi as tu perdu ton chemin ?


                        Elle le provoquait. Il l'avait bien compris. Et il était bien obligé d'admettre que ses nombreux piques faisaient mouche. Il ne pouvait simplement les ignorer, ce serait donner l'avantage. Les femmes étaient dangereuses à bien des égards. Encore plus quand elles savaient aussi bien manipuler que manier le poignard. Il continua un instant à fixer les parterres de fleurs, contemplatif. Là, dans cette chambre, las, seul l'instant comptait. Elle et lui, leurs démons, seuls à présent. Et tout autour d'eux, la tempête qu'était leurs vies respectives. Il pivota sur lui même doucement. La fixa avec intensité, droit dans les yeux, tentant d'infiltrer l'armure qui la protégée. Un instant, un très court instant, ses yeux s'abaissèrent vers sa gorge nue, vulnérable, presque transparente, belle. Un réflexe. Se rappeler que l'autre est aussi vulnérable que soit. Que derrière tout ces faux semblants, ces apparences à sauver, ces secrets à défendre, il y avait les même vulnérabilités. Faites de sang et de chair. De cartilage et d'os. Il chassa cette idée aussi vite qu'elle était apparue. Son démon, son loup intérieur, encore, qui lui murmurait doucement à l'oreille ses infâmes pensées. Une lutte permanente entre la bête et l'homme se jouait à chaque instant en lui. Chaque victoire le rapprochait de la solitude, chaque défaite de la folie.


                        Il s'approcha, cette fois sans hésitation ni doutes, le regard droit et fixe, aussi peu expressif qu'à son habitude. Tyssia avait les épaules légèrement en avant, agressive, en colère. Semblait aussi vexé que lui. Pourquoi ? Il n'en avait aucune idée. Point partout, alors. On avait vu mieux comme moyen d'entamer une relation. Mais les les bêtes avaient cette chose qui manquait aux humains. Ce besoin oppressant de ressentir les choses. La joie, la colère, la liberté, la haine. Ces sensations brûlantes à l'opposés de la morosité et des ressentis a demi-teinte en cours parmi le commun des mortels. Parfois téméraires, voir même absurdes. Mais vivants, loin de la médiocrité  banale des autres. Et tout ceux qui se refusaient à lui ressembler, étaient les autres.


                        Quelques centimètres à peine les séparés. Pour tout dire, il était rare que Rian approche d'aussi près volontairement quelqu'un pour une autre raison que lui donner la mort. La scène avait ce quelque chose de surréaliste qui lui échappée. Comme l'impression de vivre la scène de l’extérieur. 

                        - " Et qu'est-ce que tu ne souhaites pas, Tyssia ? "

                        Il la dépassait d'une bonne tête mais rien qui  pouvait l'impressionner. D'ailleurs, la légèreté avec laquelle elle lui faisait face lui plaisait. Vivre. Vivre de manière exigeante. Affamé. Loin des indolents, des faibles et des pleutres. Vivre, oui vivre, comme jamais. Comme cette sensation de picotement à la nuque que provoque le danger. Comme celle qu'il ressentait à cet instant. Qui fait battre son coeur. Qui le plantait ici devant elle. Qui les a réuni, eux, évoluant dans deux mondes si opposés et pourtant si similaires. Dans ce monde, tout s'achetait. Tout pouvait se mendier, se confisquer, se voler. Tout pouvait être négocié ou arraché. Sauf cette réalité amère et à la fois consolatrice; il n'était peut être plus seul dans cet interminable champ de bataille.  

                        Il tendit la main vers son visage, doucement, pour ne pas l'alerter plus que nécessaire. Le geste lent et calculé, son index effleura son menton. Il ramassa la petite perle de larme qui avait survécu jusqu'ici à l'angle de son visage. Il recula ensuite sa main, fixant la petite goutte d'eau salée. 

                        - "Une larme de thoréenne... Ca doit bien valoir un diamant. "

                        Il n'était pas doué pour communiquer, mais tout portait à croire qu'il s'était essayé à une blague taquine. La scène resterait volontairement ambiguë. Parade intimidante ou empathique, il laissa le doute planer consciemment. Si elle l'avait blessé, lui aussi. Aussi,il en resterait là, pour l'instant.

                        - " J'attend seulement la verité. Pour te fatiguée à intimider par les mots, tu as assez de candidats autour de toi. Il regarda respectivement le plafond, puis ses pieds. Le tapis était beau ,détaillé, sophistiqué. Confortable. Quant à mon chemin, il m'a mené ici. Jusqu'à toi, enfant des montagnes. "
                        Re: - L'autre peut être soi - [Tyssia] ─ Ven 1 Déc - 14:11
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                          L'autre peut être soi



                          Elle avait espéré une réaction, seulement elle ne savait à quoi s’attendre même maintenant qu’il se tournait pour lui faire face. Elle n’était pas une faible femme et saurait se défendre, seulement ce n’était pas un regard agressif qu’elle intercepta la laissant sans voix. Puis finalement son regard glissant sur sa gorge, lui coupant le souffle quelques secondes avant qu’elle ne fronce les sourcils. Une fois de plus elle sentit se mettre en alerte. Il était difficile d’identifier les sensations qu’il suscitait en elle… Était-ce l’impression de danger qui se dégageait de lui à chaque mouvement ? Elle n’en était pas vraiment certaine, mais cela était incroyablement proche de ce qu’elle ressentait.

                          Il la rejoignit et son coeur se remit à battre plus vite alors qu’elle dû relever la tête pour continuer à le fixer, car bien sûr, il était hors de question qu’elle ne baissa les yeux. Tenir tête à des géants, elle savait le faire avec beaucoup de succès habituellement. Le silence tendu qui s’était écoulé jusqu’à maintenant se brisa sous le son de sa voix. Ce qu’elle ne souhaitait pas ? Il y avait tant de choses qu’elle ne souhaitait pas, comme vivre en Eurate comme un animal que l’on montre… Elle cilla quand son doigt rencontra sa joue. Elle n’avait laissé qu’une seule autre personne l’approcher ainsi et cette personne était maintenant morte.

                          Puis elle fixa son doigt ayant recueilli la larme sans parvenir à admettre qu’elle lui appartenait. Elle avait laissé cet inconnu toucher une de ses faiblesses ? Elle saisit délicatement le doigt comme cherchant à ne pas lui faire peur, et le replia dans sa main avant de le fixer à nouveau.

                          -Elle ne vaut rien pour Eurate, si ce n’est me rendre faible… Garde-la donc afin que personne ne sache que la barbare sais pleurer…

                          Elle ne relâcha sa main qu’après plusieurs secondes de silence. Ses lèvres se relevèrent légèrement en une tentative de sourire gêné alors qu’elle reculait légèrement afin de remettre de l’ordre dans sa tête. Elle ne comprenait toujours pas pourquoi, il avait pris autant de risque pour la rencontrer. Peut-être que si, mais elle n’en avait pas une réponse claire et elle se contenta de hocher la tête.

                          -Et la vérité tu auras, je le promets sur les géants qui m’ont guidée, mais pour cela il faut poser une question ou tout du moins formuler une demande.

                          sa promesse n’était pas difficile à tenir, en l’état naturelle, elle n’avait jamais su mentir. Pire en fait, cela ne lui était jamais passé par la tête. Le mensonge par omission, elle l’avait tard, à son arrivé sur Eurate.



                          Re: - L'autre peut être soi - [Tyssia] ─ Ven 1 Déc - 17:59
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                            Elle l'invita à garder secret cet instant partagé. C'était une évidence pour Rian. Elle avait raison, aucune faiblesse ne devait jamais être apparente. Parler peu, pour ne pas offrir d'arguments. Frapper fort, pour ne laisser aucune chance. Ne jamais laissé de failles, jamais de doutes. Ces prescriptions sacrés étaient bien plus qu'un mode de vie. Elles étaient le seul moyen de tenir, de vivre, de réussir dans un monde empli d'ennemis. A la même place, il resta un long moment à fixer son index en écoutant avec attention les paroles de la brune. Sa question pourtant, laissa un gout perplexe à Rian. Il savait ce qui le taraudait. Comme une sensation, un ressenti. Mais poser des mots sur quelque chose d'aussi intime et personnelle lui donnait l'impression d'avoir à gravir une muraille. Non, il aurait préféré la muraille. 

                            Il se plongea alors dans une réflexion profonde sans pour autant détacher les yeux de son doigt. Des questions il devait en avoir probablement des centaines. Certaines plus importantes que d'autre. Son parcours n'était pas des plus communs mais il y a déjà plus d'une décennie qu'il cessa de se morfondre à ce propos. Ce qui l'inquiété était l'avenir. Comme s'il n'en avait aucune part. Condamné à une errance éternelle. En rupture avec ce monde, avec les autres. Une colère aveugle dirigée vers eux. Les méprisant pour leur différence, se méprisant soi-même d'être différent d'eux. Son retour en Eurate détruisit les dernières pousses d'espoir en lui. Lorsqu'il comprit qu'il n'était pas plus chez lui ici qu'il ne l'était dans les bois obscures de l'Ouest. Lorsqu'il réalisa que la seule chose de valeur pour lui était d'enfin parcourir le monde tel qu'il était, fidèle à lui même, à ce qu'il était devenu et non pas à ce qu'on attendait de lui. Qu'on ne lui lie ni pieds ni mains, qu'on ne bride pas son coeur. Simplement vivre spontanément, laissant surgir et rugir ce qu'il y avait en lui. Mais pourquoi était-ce si difficile ? Pourquoi les joies, les facilités et les rires des autres le fascinaient tant ? Comme un aspect qui lui échappé. Un sentiment de marge permanent. Une solitude dévorante, déchante. Déchiré entre son humanité et sa Bête, entre le désir de goûter et l'indépendance qu'il arracha avec difficulté. Pour lui, il était alors impossible d'établir une paix entre les deux. Pourtant... Pourtant cette femme, qui se tenait à quelques pas de lui y étaient parvenus. Tout du moins en apparence. Etait-elle elle même ? Etait-elle... Heureuse  ? Au fond, il savait que non. La tristesse avait établi son domicile au creux de ses yeux bleus. Peut être pour des raisons différentes que Rian. 

                            Il reposa les yeux sur elle un instant. Le temps de formuler au mieux. Sans trop en donner, sans trop en montrer. Bien que la tâche semblait herculéenne. 

                            - " Je ressens ton malheur... Il est semblable au miens et pourtant, différent. Il se tût un instant, tentant de faire tenir en quelques mots la réelle teneur de sa pensée. Comment fais-tu ? Je suis si loin de ce monde. Si loin de ces gens. Et pourtant toi, tu parviens à être parmi eux, alors que leurs yeux sont plus fourbes que ceux des loups. "

                            Tout d'un coup gagné d’anxiété, le stress le conquit rapidement. La frustration de ne pas parvenir à correctement s'exprimer l'impatientait, le faisait se sentir pitoyable, faible. Pestant contre lui même il tenta une dernière fois :

                            - " Pourquoi es-tu encore la ?! Pourquoi mon cœur ne peut se conforter à cette idée ? "

                            Le raisonnement était en réalité plus simple que ça. Si elle y parvenait il le pouvait théoriquement lui aussi. Malheureusement, jusque là tout essai avait été conclu par un échec. Elle le renvoyait à lui sans cesse. A ses incapacités, ses handicaps. A la seule et unique chose qu'il détenait : la liberté de mourir. Etait-il le seul à être torturé entre deux mondes, deux temps, deux visions ? L'espoir de ne plus parcourir ces landes désolées seul... Voila une motivation suffisante pour braver Lois et Chatiments. 
                            Re: - L'autre peut être soi - [Tyssia] ─ Sam 2 Déc - 18:58
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                              L'autre peut être soi



                              elle resta un long moment en retrait, l'observant dans sa réflexion intense. Au fond, une partie d’elle savait exactement pourquoi il était là dans cette pièce avec elle. C’est un peu comme si elle arrivait à suivre une partie du cheminement de ses pensées tandis qu’une question prenait naissance dans son esprit à elle. Était-il la représentation de ce qu’elle allait devenir si elle ne trouvait aucune place dans ce monde ? Elle serra discrètement son poing, retenant un mouvement qu’elle savait qui serait mal perçu et qui la surprenait elle-même. Finalement, la solitude était un fardeau qu’elle ne pouvait et ne devait pas partager. Elle venait de se fermer sur elle-même, ne lui offrant qu’un regard sans émotion quand il mit fin à sa concentration. Pourtant, les mots qu’il employait firent une nouvelle fois un troue dans le cuir de sa carapace.

                              Il ressentait son malheur alors qu’elle avait pris un soin particulier à le cacher. Et, il osait lui demander comment elle faisait ? C’était malheureusement visible selon elle. Elle ne faisait tout simplement pas partie de ses gens, de ce monde. Elle avait seulement enfermé ses doutes dans un coin de son esprit et avançait malgré tout. IL n’y avait rien d’autre, pas de miracle pas de tour de magie…. Comme les animaux, elle refusait simplement de mourir plus fort que ces gens et leur intrigue. Elle haussa les épaules à sa première demande et croisa les bras avant de lui répondre par la même question.

                              -Et toi comment fais-tu ? Tu te trompes je ne suis pas parmi eux…. Même avec mes ascendants nobles je ne suis pas des leurs. Tant que je les amuse et leur donne l’impression qu’ils me contrôlent, ils font semblant d’oublier qu’ils me détestent et que je leur fais peur...


                              Elle eut un sourire carnassier, qui laissa luire un instant ses dents qui auraient fait trembler n’importe quel Euratiens. Elle était à cet instant plus prêt de la Thoréenne que de la noble qu’elle devait être. Elle détourna le regard prenant conscience qu’elle n’avait pas plus sa place en Thorée maintenant. Répondant à ses propres tourments, il lui demande ce qu’elle faisait encore la. Que pouvait-elle répondre à cela ? C’était sa faute après tout, il n’avait fait que répondre à sa demande. Elle releva ses yeux sur lui cherchant avec précaution les mots qu’elle allait prononcer. Elle lui avait promis la vérité et c’est ce qu’elle comptait faire même si pour le coup cela lui demandait beaucoup.

                              -Si on ne me laisse ma place nulle part, je compte la leur arracher de force...



                              Re: - L'autre peut être soi - [Tyssia] ─ Sam 2 Déc - 22:00
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                                Dans sa réponse, la jeune femme retourna la question à Rian. Comment lui faisait-il ? Il ne comprenait pas. La comparaison était-elle possible ? Personne ne l'attendait, lui. Personne ne s’enquérait de sa situation. Non, qu'il vive ou non n'affecterait personne. Personne ne s'assurait de son bien être, encore moins de si oui ou non, son estomac avait été garnie. Il était comme sans visage. Inconnu et ignoré. Remettant son existence en question. Jusqu'à ce que sa lame s'insinue entre leurs cotes. Jusqu’à ce que le sang n'éclabousse son visage. Que sa chaleur lui rappelle qu'il n'était pas une ombre, encore vivant. Qu'il existait bel et bien. Puis les images de son passé resurgirent. Par fragments. Lorsqu'il n'était qu'une chose. Leurs chose. Fragiles et misérable, pathétique. Toutes ces journées sans fin à être malmené. Parfois battu, parfois traîné face contre terre. Toujours humilié. Lorsqu'il était privé de vie, de souffle. Emprisonné, a moitié nu, laissé au gré des caprices du temps. Il passa ses doigts contre sa joue, caressant les cicatrices que le froid et la pluie laissèrent sur sa chair. Comment avait-il pu occulter ces instants. Comme si sa vie avait démarré le jour ou il s'affranchit. Non, lui aussi n'a été pendant longtemps que le jouet à la merci de ses tortionnaire. Et durant de longues, trop longues années, il n'a rien eu à faire d'autre que de patienter. Jusqu'à son heure. 

                                Au final, d'un point de vue plus extérieur, Tyssia avait totalement raison. Lui aussi compose avec. S'adapter, survivre. Pas d'autre échappatoire. Et elle le confirma à peine quelques instants après.


                                -Si on ne me laisse ma place nulle part, je compte la leur arracher de force...


                                Ses yeux s'agitèrent instantanément avant de se plonger dans ceux de Tyssia. Ils ne bougèrent plus. Pendant un long moment. Ni clignements, ni cillements. Il n'eut pas à réfléchir pour comprendre ce qu'elle disait. Pas besoin de demander plus de précisions, plus de détails. Il finit par détacher ses yeux des siens et se mettre à faire les cents pas, calmement. De lentes largeurs, dans cette pièce aussi vaste qu'un salon. Etait-ce une épreuve ? Un test ? Il n'aurait pu s'attendre à un tel aplomb. En d'autre mots, elle lui donnait les clé de son avenir. En d'autre mots, elle lui avouait préparer un coup d'éclat. Probable trahison ? Il n'était pas coutumier des méthodes des nobles et de leurs cour, mais il n'était pas stupide. Les querelles de pouvoir était prises très au sérieux. Si Tyssia souhaitait s'affranchir et s'affirmer dans cette arène, de grands dangers la guettaient. Si l'information venait à fuiter, elle serait certainement traquée, tuée, ou pire. Alors pourquoi l'avait-t-elle laissée s'échapper? Il reposa un regard sur elle tout en faisant des vas et vient. Non, elle n'était pas du genre à lancer des mots à la volée sans en saisir la portée. Il savait. Elle le savait. Après avoir fréquenté la mort et les épreuves, la boue et le sang, on ne pouvait que mesurer la portée du danger qui menacé. Conclusion; elle avait parfaitement mesuré la portée de sa phrase. Bon sang. Il se sentit tout d'un coup chargé d'un poids lourd. Un secret de plus. Sauf que cette fois, il ne le concernait pas. Pour la première fois, c'etaitle fardeau d'une autre qu'il porterait. 

                                Il finit par s’arrêter au milieu de la pièce. Le silence durait déjà depuis un bon moment et enfin, il finit par y mettre un terme, les lèvres formés en une moitié de rictus. 


                                - " Et donc ? La Thoréenne s'en va en guerre ? ...Seule ? "

                                Décidément. Celle la, elle lui plaisait de plus en plus. Il donnerait cher pour être présent ce jour béni ou, contre toute attente, le pantin cessera de gesticuler et se rebellera. Oui, il donnerait cher pour voir tous ces nobles pompeux se décomposer face à l'affront de la sauvage. Et il aimerait aussi être là, pour voir ce que construiront ses mains fines et pourtant fermes, bénies eux aussi, par le Destin. 
                                Re: - L'autre peut être soi - [Tyssia] ─
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