Re: Une sale histoire, un sale boulot [PV : Anastasie & Gregor] ─ Lun 30 Juil - 7:54
Anastasie LunétoilePrêtresse
Gregor semblait étonnamment gai alors qu'il répondait à son tour à la question concernant sa famille. Il expliqua sans le moindre problème qu'il était orphelin et avait grandi dans un monastère, ce qui rappela à Ana son ami Florimond. Décidément, les prêtres n'étaient pas très nombreux à posséder encore une famille, du moins au moment de leur départ. La prêtresse songea un instant qu'elle ne connaissait d'ailleurs aucun clerc qui avait gardé contact avec les siens pendant ou après sa formation à Nacre. C'était peut-être mieux, ils étaient plus impartiaux apparemment. Anastasie, qui avait été longtemps attristée par cette séparation, espérait en tout cas qu'elle était justifiée par quelque chose.
Mais j'vous trouve bien comme sœur ! Si vous voulez, vous pouvez être ma sœur !
La proposition était assez amusante, et Anastasie ne se priva pas de rire doucement. Gregor semblait être plein d'humour, du moins lorsque la situation n'était pas trop grave, et donc d'une compagnie tout à fait agréable. Mais avant qu'elle n'ait eu le temps de dire quoi que ce soit, ou même simplement de faire taire son léger éclat de rire, la porte s'ouvrit assez brutalement. Anastasie tourna la tête vers le seuil, et aperçut un inconnu. Ce dernier n'avait pas l'air aussi porté sur la rigolade que les deux prêtres à ce moment précis, et son air austère, digne et distingué, suffisait à mettre une distance évidente entre eux, que ses vêtements riches soulignaient naturellement. Le sourire d'Ana s'effaça rapidement de son visage.
Mademoiselle, monsieur, bonjour. Je vois que... vous semblez aller mieux. Je suis heureux que nous ayons pu vous aider. Je me présente, Archibald Demontaigue. Ravi de vous accueillir chez moi. Votre présence semble éclairer notre maisonnée. Sachez qu'une de nos domestiques vient d'accoucher ! A peine quelques instants après que vous soyez arrivés ! Sans doute un bon présage. Si... hum... l'un de vous... monsieur je suppose, pouvait venir nous aider pour les quelques soins... et pour baptiser l'enfant, je vous en serais très reconnaissant... Mais, je veux être sûr que tout soit réglé ici même...
Il ne fallut pas plus de temps à Anastasie pour se dire qu'elle n'appréciait pas monsieur Demontaigue. Elle savait que ce n'était pas bien, et qu'elle était censée accorder la même bienveillance à chacun... Mais il avait une manière de parler qui montrait très aisément qu'il les accueillait volontiers mais tout en espérant qu'ils lui rendraient service. La simple bonté ne paraissait pas lui effleurer l'esprit, et même dans les circonstances présentes il osait qualifier leur venue de « bon présage ». Il aurait dit « profit », ça aurait été la même chose et peut-être même plus juste.
C'est à ce moment là seulement qu'elle remarqua que Gregor avait fini la bouteille d'eau-de-vie. Elle ne put pas s'empêcher de se dire que son air inquiet devait y être lié : il craignait peut-être les représailles du maître des lieux à ce sujet.
Comment vous sentez-vous, Anastasie ?
Un léger sourire lui revint, et elle répondit tout d'abord à son confrère en le regardant.
-Bien mieux, merci, ne vous inquiétez pas pour moi.
Alors, elle ne put s'empêcher de tourner la tête vers monsieur Demontaigue, se forçant à garder le même sourire bien qu'il ne lui inspire pas autant de sympathie qu'il le pourrait.
-Je vous remercie de votre accueil, dit-elle en forçant sur sa voix faible pour être sûre qu'il l'entende convenablement. Nous serons ravis de vous aider à soigner la mère et l'enfant, commença-t-elle. Le « nous » n'était pas choisi par hasard : Anastasie n'avait pas pour habitude de faire passer son confort avant son devoir et si quelqu'un avait besoin d'aide elle n'hésiterait pas à se lever tout de suite pour la lui apporter, qu'on la considère sortie d'affaire ou non. Mais nous sommes des prêtres de Tamas, ainsi... Même si nous savons effectuer les rites de naissance, nous n'avons probablement pas les amulettes et ingrédients nécessaires avec nous.
Ana regarda à nouveau Gregor, l'air interrogateur cette fois. Elle parlait pour eux, mais au fond elle n'avait aucune idée de ce qu'il pouvait bien transporter. Elle, elle ne connaissait que le contenu de son maigre sac, où elle transportait de quoi soigner quelques blessures – même si elle n'avait rien imaginé de si grave que ce qui venait de lui arriver en partant de Terresang. Partager ses biens ne lui posait aucun problème, mais elle n'avait tout simplement pas ce qu'il fallait, parce que ce n'était pas à eux de faire cela habituellement. Ils s'occupaient souvent des blessés et des morts, et il était presque triste que le maître de maison en vienne à leur demander à eux de s'occuper de l'enfant juste pour s'épargner d'avoir à faire appel aux prêtres les plus qualifiés.
-Moi en tout cas, je n'en ai pas un seul.
Elle craignait la réaction de monsieur Demontaigue mais espérait qu'il ne leur en voudrait pas. Ou pas trop.
Re: Une sale histoire, un sale boulot [PV : Anastasie & Gregor] ─ Lun 30 Juil - 16:50
Anastasie semblait aller un peu mieux... et si Gregor se doutait bien qu'elle ne pouvait pas être déjà complètement remise, elle faisait sacrément bonne figure. Il craint donc de devoir laisser son chevet pour s'occuper de celui de la femme et de son nouveau né. Mais c'était mal connaître la prêtresse. Eut-elle pitié de la détresse de son confrère ou bien voulut-elle simplement aider ses prochains, elle proposa en tout cas d'accompagner Gregor - de fort subtile manière - dans la tâche qui venait de lui être confiée.
Lorsqu'elle donna ainsi sa réponse, le maître des lieux ne put, l'espace d'un instant, cacher une sorte de mou contrariée.
Gregor, quant à lui, sourit en fouillant dans sa petite besace.
- Onguent des rivières, poudre de châtaignes, feuilles de lauriers... Je crains qu'il ne me manque également de quoi faire les fumigations.
Le sieur Demontaigue sourit d'un air bienveillant...
- Alors voici quelques pièces pour que vous puissiez acheter le nécessaire... Mademoiselle sera ainsi exempté de cette fatigante course et pourra commencer les soins de la mère et de l'enfant.
Un frisson parcourut l'échine du prêtre. Il se sentait pris au piège. Il avait les pièces dans la main et voyait celle du maître de maison se tendre vers celle d'Anastasie. Il avait l'intime conviction que l'homme était mauvais et préparait un sale coup. Pourtant il n'avait rien fait, rien dit qui eut pu suggérer une quelconque perfidie de sa part, n'est-ce pas ?
- D... D'accord, bredouilla Gregor en jetant un regard désolé en direction de la prêtresse.
Pouvait-elle, elle-même, faire quelque chose ? Ressentait-elle la même chose que Gregor au sujet de Demontaigue... Il sembla à Gregor qu'elle aussi n'était pas rassurée par cette situation et cet imposant personnage.
Gregor attendit donc un instant mais lorsque ses yeux croisèrent le regard inquisiteur du maître des lieux, il dut se résoudre à prendre la direction de la porte...
Re: Une sale histoire, un sale boulot [PV : Anastasie & Gregor] ─ Jeu 2 Aoû - 10:19
Anastasie LunétoilePrêtresse
Monsieur Demontaigue n'avait pas l'air ravi, c'était le moins qu'on puisse dire, et Anastasie se retint de lui présenter ses plus plates excuses. Elle savait bien qu'elle ne devrait pas s'en vouloir, après tout elle n'y pouvait rien si elle n'avait pas ce qu'il fallait : elle n'avait pas pour habitude de faire ce genre de choses. Mais Anastasie ne pouvait pas vraiment accepter l'idée de contrarier quelqu'un et de le faire presque volontairement. Elle détourna les yeux.
Onguent des rivières, poudre de châtaignes, feuilles de lauriers... Je crains qu'il ne me manque également de quoi faire les fumigations.
Bon, l'affaire semblait réglée. Ils n'avaient pas de quoi rendre ce service, et cela donnerait sans doute une bonne leçon à monsieur Demontaigue qui apprendrait alors que toutes les économies n'étaient pas possibles ni souhaitables. Mais au contraire, il sourit d'un air hypocrite qui ne dit rien de bon à Anastasie, et répondit.
Alors voici quelques pièces pour que vous puissiez acheter le nécessaire... Mademoiselle sera ainsi exempté de cette fatigante course et pourra commencer les soins de la mère et de l'enfant.
Archibald donna tout de suite les quelques pièces à Gregor, comme s'il avait tout à fait prévu cette possibilité. Gregor ne semblait pas du tout conquis par cette proposition, et lançait vers Ana un regard désolé et presque anxieux alors que monsieur Demontaigue s'approchait de la prêtresse en tendant une main vers elle. Le prêtre finit néanmoins par donner son accord en bredouillant, et même si Anastasie partageait le mauvais pressentiment qu'il ne dissimulait qu'à peine, elle lui adressa tout de même un sourire destiné à le rassurer. Même si elle mentait mal, et que ça ne devait pas du tout avoir l'effet escompté.
-A votre service, dit doucement Ana sans quitter Gregor des yeux.
Alors que le prêtre quittait la pièce, monsieur Demontaigue n'hésita plus à s'approcher carrément d'Anastasie pour l'aider à se lever, visiblement très impatient qu'elle s'occupe de la tâche qui lui avait été confiée. Elle eut beau lui demander d'y aller plus doucement, lui expliquer que se relever si vite lui donnait des vertiges, et qu'il lui faisait mal en appuyant sur son bras blessé, celui-ci y fut tout à fait insensible, bien trop pressé.
La prêtresse aurait aimé que Gregor reste, que ce soit lui qui l'aide, mais il n'était pas là et il ne lui serait de toute façon jamais venu à l'esprit de hausser la voix pour attirer son attention tant qu'il ne devait pas être trop loin. Quelqu'un cependant vint à son secours, probablement sans même s'en rendre compte. La porte s'ouvrit à la volée, si brusquement qu'Archibald lâcha Ana qui retomba sur le lit en geignant.
Une femme à l'air aussi sévère que monsieur Demontaigue se tenait là, mais son visage respirait d'une sympathie tout à fait contraire. Ana mit quelques secondes avant de suivre tout à fait la conversation à cause de la douleur de son bras qui n'avait pas été ménagé, mais la dame était simplement en train de se disputer avec celui qui était de toute évidence son mari, en lui expliquant qu'on ne pouvait pas attendre d'une prêtresse blessée qu'elle vienne au chevet de quelqu'un d'autre, et qu'il ferait mieux d'être un peu plus pieux et moins égoïste. La discussion ne semblait pas pouvoir se terminer de manière heureuse, puisque aucun des deux ne voulait abandonner sa position, mais la dame finit par approcher d'Ana tout en lui présentant des excuses au nom de son mari. Ils continuèrent cependant à se prendre la tête tous les deux sur la conduite à tenir, jusqu'à ce qu'Anastasie, fatiguée par tous ces cris inutiles, ne se redresse doucement en s'appuyant contre le mur. Elle dut se racler la gorge plusieurs fois avant d'avoir assez de silence pour qu'on puisse l'entendre parler.
-Je vais y aller, ne vous en faites pas...
La femme, qui ne s'était toujours pas présentée, la remercia bruyamment et l'aida à se mettre sur pieds, non sans continuer de faire des reproches à son époux en disant qu'elle ne faisait cela que parce qu'elle devait s'y sentir obligée par sa faute. Elle vit Anastasie tenter de porter son sac, où se trouvaient sans doute quelques affaires dont elle aurait besoin, et s'empressa de le lui porter et de la prévenir qu'il valait mieux garder ses forces pour la médecine. Ana la remercia avec sa timidité habituelle, et les deux femmes se mirent en route pour aller trouver la mère et son enfant. Anastasie s'arrêta néanmoins dans le couloir, croyant apercevoir Gregor de retour. La dispute des deux époux avait-elle était si longue ?
Re: Une sale histoire, un sale boulot [PV : Anastasie & Gregor] ─ Mer 8 Aoû - 20:48
Gregor vit une once de détresse dans le regard de sa consœur... mais comme les dés semblaient jeté, il se dépêcha de quitter la pièce, priant les Dieux pour que rien n'arrive à sa consoeur. Il descendit l'escalier et là, dans le couloir, trouva une domestique qui venait, un plateau de fruits dans les mains, dans sa direction. Une idée vint alors au jeune prêtre.
- Excusez-moi, chère madame, mais... auriez-vous des châtaignes et... et du laurier ?
La femme ouvrit de grands yeux ronds... Le prêtre voulait-il la remplacer un cuisine ?
- Euh... oui, mais... pourqu
- C'est pour la naissance... il faut préparer tout ça au plus vite ! C'est une question de vie de mort !
C'était la deuxième fois aujourd'hui qu'il invoquait une telle urgence et, même si l'urgence n'était pas tout à fait réelle, elle n'était pas tout à fait fausse non plus, et comme cette tactique avait fait ses preuves, Gregor n'eut aucun remord à l'utiliser de nouveau. Les yeux de la femme montrèrent un peu d'inquiétude mais elle invita aussitôt le prêtre à la suivre en cuisine. Dans la grande pièce carrelée, elle lui sortit les deux ingrédients demandés, et, pendant qu'il s'attelait à les réduire en une fine poussière brunâtre, il demanda, à tout hasard, si la dame avait de l'onguent des rivières. Logiquement, la cuisinière lui répondit par la négative, ajoutant seulement qu'elle avait un onguent de mer - connu pour ses bienfaits sur les rhumatismes... Et le prêtre se dit que mieux valait tromper un peu la recette plutôt que laisser Ana entre les mains de l'étrange maître de maison.
Il mélangea rapidement les ingrédients jusqu'à obtenir la fameuse mixture de baptême. Chipant quelques rameaux de vignes bien secs pour faire les fumigations requises, il remercia la cuisinière avant de retourna à l'étage les mains plaines et l'esprit rassuré.
Sur le palier, Ana était là, aussi légère et vacillante qu'une feuille de chêne à la fin de l'automne. Gregor regarda la personne qui l'accompagnait. L'homme fort s'était transformé en femme décidée. Cela n'était pas un mal. Pressant le pas, le prêtre vint soutenir l'autre bras d'Anastasie et se présenta.
- Je m'appelle Gregor, je suis prêtre, j'aide mademoiselle Anastasie pour... pour tout ce qu'elle a à faire aujourd'hui.
- Isobel Demontaigue, enchantée de faire votre connaissance, allons-y !
Derrière-eux, le maître de maison, la queue entre les jambes, annonça solennellement qu'il avait une importante visite à rendre et qu'il souhaitait une bonne réussite aux deux clercs. A l'oreille d'Anastasie, Gregor chuchota :
- Désolé de vous avoir laissé avec lui... mais les Dieux semblent avoir entendu ma prière ; tant mieux...
Et tandis qu'ils avançaient vers une porte entrouverte, les cris d'un bébé se firent entendre. Gregor sourit. Quelque soit la situation de ce nouveau-né et de sa mère, une naissance était toujours un signe de la présence bienveillante des Dieux. Sans même s'en rendre compte, il prit doucement la main d'Anastasie.
Re: Une sale histoire, un sale boulot [PV : Anastasie & Gregor] ─
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