Rien de plus qu’un produit d’Evalon, fruit de ce qui peut pousser dans le compost humide de la basse-cour courtisant la capitale. Haganon a été l’un de ces songe-creux, avant que la réalité n’éprouve sa foi aveugle ; Discipliné, parfois même zélé, l’ancien troupier s’est retrouvé en de trop nombreuses occurrences, confronté aux lamentations du peuple. Celui qui arborait jadis les couleurs de la garnison, fier d’être pont entre la plèbe et la noblesse, porte aujourd’hui le gris, de la mine au manteau. La considération dont-il était en quête, ne s’adresse plus qu’à la trinité ; Son ambition ne s’arrête plus à la possession l’écu, mais à la volonté de le brandir, pour la dignité des faibles. Sa piété soulève le scepticisme, ses méthodes divisent l’opinion, mais son habileté au combat met tout le monde d’accord. S’il aspire à être respecté par estime, il l’est d’avantage par crainte, fardeau qu’il déplore sans pouvoir s’en libérer. Son caractère ombrageux et son intransigeance ne facilitent guère les négociations et ses échanges se payent chèrement, souvent par le plus sanglant des tributs.

La roture connait de lui, deux visages ; Celui qu’il affichait sous les atours de la garde et celui qui orne désormais le vantail de son heaume. Le soldat corrompu, taiseux et sujet à l’ardeur devenu une sinistre vanité, administrant les ordalies du pommeau à l’estoc de sa bâtarde. Ceux qui l’ont choisi pour champion, parlent d’un juste et d’un repentant ; Les autres, d’un opportuniste en quête de sa seule solde. Les corrompus et les rebuts, apprennent à le connaître, à le haïr mais aussi à le craindre. Sa résolution est désormais connue de toutes les âmes du cœur d’Eurate et ses actes, bien  qu’en accord avec la loi, donnent même aux plus enhardis, matière à méditer et prier. Le dernier fils Aiguespir fut à l'image de son paternel, Sisenand, un vieux tailleur de pierre, gaillard et sans façons ; De cet héritage ne demeure que le franc-parler, porté par des élans revêches. Haganon est un homme farouche, difficile à apprivoiser, un âne bâté diraient certains. D'une nature sauvage, il est plus à l'écoute de ses sens et de son instinct, que de sa raison et ne manquera pas, d'être trahi par ses ressentiments ou inclinaisons. Il cède volontiers l'attention du tout venant aux fanfarons, préférant capturer l'authenticité à travers une approche discrète ; Siège de son talent d'observation, de sa faculté à lire sur les visages et à travers les gestes. Un atout qu'il met tout aussi bien au service de sa brette lors de combats à pied, que dans le cadre d'une investigation. Il n'est un secret pour personne que ses convictions religieuses et résolutions arbitraires, ont un lien avec le décès de sa promise Galswinthe et plus encore, avec l’exécution du jeune Desle. Tragédies qui ne sont, pour la lame des Doléants, que les jalons d'une vie dissolue ; Une épreuve divine qu'il tente encore de surmonter pour son salut et celui de ses proches. Réceptif au courroux comme à la bienveillance, il répond à toute forme d'inspiration. Ceux qui sauraient lui instiller le meilleur, passant les mailles de sa défiance et plates de sa vigilance, pourraient bien entrevoir l'engagé rêveur qu'il fut. Un conscrit que les turpitudes d'une host ont bridé et souillé. Face aux manifestations de déférence et d'humilité, il répond avec probité et aménité ; Il est homme pour qui le respect n'est pas un droit, mais une vertu, n'en déplaise aux seigneurs.

( En cours )

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