Malgré l’heure tardive, les festivités battaient leur plein dans la capitale et à proximité de celle-ci. Les différentes démonstrations d’armes avaient su subjuguer leur public. Les joutes avaient vu s’affronter des chevaliers venus des quatre coins de l’empire.
Le soleil commençait à décroître mais il aurait fallu être sot pour ne pas imaginer que, dans les rues éclairées des lueurs des torches, l’activité se serait couchée avec lui. La réalité était d’ailleurs complètement opposée. Pour l’occasion le couvre-feu habituel avait été levé, au plus grand déplaisir de la garde d’Evalon. Les jongleurs avaient sorti leurs torches, les faisant tournoyer alors que, dans les nombreuses tavernes restées ouvertes, vin, bière et hydromel coulaient à flot.
Dans les plus hautes sphères, les amusements se faisaient en comités plus fermés, plus restreints, servant à la fois de moment de détente et de moment de politique.
Pour une poignée de personnes, en revanche, cette toute première soirée allait se dérouler dans un tout autre endroit, l’une des résidences privées appartenant au trône impérial.
Des gardes aux couleurs impériales étaient postées devant le portail donnant accès tant au jardin qu’à la bâtisse elle-même. Pour y entrer rien n’était plus simple, il suffisait seulement de présenter une invitation dont le nombre avait été volontairement assez réduit.
Quiconque franchissait cette frontière se voyait accueillir par un serviteur portant un masque de lapin, parfaitement blanc. L’ensemble des serviteurs de la soirée portait ce même masque de lapin blanc et offraient à chaque invité un masque représentant un animal différent. S’agissait-il d’un simple bal masqué ? Les serviteurs ne semblaient pas être autorisés à répondre à cela.
A l’intérieur de la résidence, deux hommes-lapins empêchaient l’accès aux escaliers menant à l’étage, conduisant les invités vers une autre grande salle où se trouvait un banquet. Les seuls instructions qu’ils semblaient prêts à révéler pour l’instant étaient de profiter de ce moment le temps qu’arrivent tous les convives.
Une belle robe offerte par la comtesse, des talons dignes d'une véritable noble... Et un long soupire d'agacement qui se fit entendre lorsque tu finis par entrer dans le hall principal du bal. Est-ce que quelqu'un t'avais entendu ? Certainement. Est-ce que tu en as quelque chose à fiche ? Absolument pas. Tu es ici en qualité de garde du corps, et certainement pas pour autre chose, quand bien même ce masque de l'animal le plus adorable du monde, j'ai nommé le chat, te sied parfaitement au visage. Tu as beau avoir un visage adorable, que tout le monde ou presque voudrait prendre dans ses mains, tu restes une créature solitaire. Et dieu sait que tu souhaites le rester et tu le restera. Il n'y a qu'en présence de ta boss que tu tolères une autre personne à tes cotés, et qui est donc la raison de ta présence ici.
La comtesse a été conviée a une fête, et masqué qui plus est, l'endroit idéal pour pérpétrer ses plus viles tentatives de meurtres à tes yeux et donc la raison pour laquelle tu es ici, prête à sauter sur le premier malheureux qui s'approcherait trop près d'elle. Paranoïaque ? Très certainement, mais c'était une simple mesure de sécurité de l'accompagner, et puis, certes tu détestes les bals, mais certainement pas les buffets. Et alors que tu suis les gardes impériaux vers la salle où tu devais te rendre pour "profiter" de la soirée. Du monde semblait déjà être arrivé avant toi, et tu ne peux que tiquer à cette idée. Tu aimes être la première en tout, et te savoir devancée t'agace un peu. Mais qu'importe, une fois arrivée sur place, hormis Dame Kira, tu ne vois rien d'autre que le buffet que tu t'empresses d'aller visiter pour goûter aux mets de la famille impérial, en espèrant que la soirée se passe mieux que ta dernière journée dans la capitale de l'empire...
La soirée battait son plein, alors que les invités, de marque ou non s’étaient semble-t-il tous donnait rendez-vous ici. Néanmoins, tu en avais que faire, et seul le banquet t’intéressait. Et même si ta Dame n’avait pas manqué de te moquer pour ton manque d’engouement. Tu n’avais même pas cherché à savoir qui avait quel animal comme masque, assurée, quoi qu’il en soit, que tu avais sans nul doute l’animal le plus gracieux et majestueux qui soit… Et accessoirement, celui qui te ressemble le plus. Dans tous les cas, tes yeux n’avait d’intérêts que pour ta Dame, au cas où quelqu’un tenterait de s’approcher de trop près, et ta nourriture, au cas où il viendrait à manquer.
La fête prenait place dans la nuit, trouvant son rythme de croisière sur celle-ci, jusqu’à ce qu’un serviteur, ou tu ne sais qui d’autres avait décidé de vous lancer dans un petit jeu. Un peu étrange selon toi, mais c’était surement l’une des coutumes aussi étrange qu’original des nobles. Ni une ni deux après que l’annonce fut faite, Dame Kira se tourna vers toi pleine de détermination. Tu compris immédiatement que ce n’était plus le moment de faire dans la légèreté. Tu l’écoutes, comme un chien écouterait son maître, plein d’enthousiasme, mais ne comprenant qu’un mot sur deux. Sa logique n’était, justement, pas logique, et après avoir avalé ton dernier gros morceau de tartelette à la pomme, très bonne d’ailleurs, si tu le pouvais, tu irais saluer le chef.
- Ma dame. Tu prends de nouveau ton air sévère et complètement impassible, tu reprenais enfin ton rôle qui t’allait définitivement le mieux. Inutile de perdre votre temps avec mes propres quêtes, qui sont secondaires. Je ne tolérerais pas que vous perdiez cette course à cause de ça, et je tolérerais encore moins que quelqu’un récupère les siennes avant vous. Je vous suis où vous irez ou où vous demanderez d’aller. Néanmoins, et en ma qualité de garant de votre protecteur envers vous, je souhaite vous prévenir que cette histoire de jeu ne me plait pas du tout, et qu’il y a très certainement anguille sous roche à mes yeux, donc permettez-moi de ne pas vous quitter des yeux pour m’assurer que vous ne soyez pas en danger.
Clair et précis, comme d’habitude. Ta propre personne importe peu dans ce « jeu », car quoi qu’il arrive, tu sais que tu n’es pas douée pour triompher dans ce genre de loisir, et très clairement, si cela n’est pas un traquenard, tu te vois mal te pavaner au milieu avec un sourire idiot car tu as trouvé des objets identiques à ton masque. Non, tu te doutes que la comtesse sera bien mieux utiliser les bonus et les honneurs que rapporterait une telle victoire. Et puis plus simplement, tu ne peux pas voit pas la trahir juste pour quelques patpats d’une personne dont tu as que faire. Ta loyauté est bien plus chère que ça.
- Si nous sommes d’accord, alors allons-y.
Voici donc qu'un aigle orgueilleux et impétueux venait se joindre aux deux jeunes femmes. La Comtesse n'eut même pas le temps de répondre à sa protectrice qui semblait vouloir faire passer les besoins de sa Dame avant les siens propres. Mais Kira ne l'entendait pas de cette oreille, évidemment. Cependant, avant de répondre à la belle blonde, la montdragonnière se tourna vers le nouvelle arrivant. L'observant quelque peu, de bas en haut, puis de haut en bas, du bout des orteils, jusqu'au bout du bec en papier, elle se demanda qui donc se cachait derrière ce fringuant accoutrement. Mais rien, même pas le sourire de l'homme qui venait leur proposer son aide, n'aidait la jeune femme à savoir qui donc se cachait sous ce masque quelque peu réussie.
« Mais vous n'importunez personne, cher ami rapace. » commença la belle Comtesse, amusée. « Et oui, vous avez bien entendu, anguille sous roche. Oh, ne cherchez pas dans le paysage de masques et de visages, je ne pense pas qu'un masque d'anguille se cache parmi nous. Toutefois, nous savons, ma tendre amie et moi-même, que ce genre de bal n'augure généralement pas qu'une simple danse avec de gentils inconnus. »
Ce n'était pas une exception. Kira savait qu'à chaque manifestation festive, il y avait quelque chose qui se préparait en coulisse. Des fois, c'était des meurtres, des assassinats, des disparitions également – comme ce que redoutait la belle Karîn, probablement, d'où le fait qu'elle insiste sur la protection de sa suzeraine. Mais d'autres fois, c'était des couronnements, des annonces de mariages ou d'enfantement. La Casteldragon n'espérait ni l'un ni l'autre, car en tous les cas, cela inaugurait une nouvelle ère, et ce ne serait pas forcément bon pour l'empire euratien. Mais peu importait, Kira sentait la belle blonde se dandiner à côté d'elle, jetant des coups d’œil à sa Dame, mais également au buffet, elle trépignait, ne sachant quoi faire, mais également intriguée et méfiante envers l'Aigle nouvellement arrivé. La Comtesse rappela Karîn à elle, lui répondant enfin :
« Et, étant donné que cette soirée va probablement être pleine de surprise, très chère amie. Je vous demanderais de rester au près de moi, ainsi, nous entrerons peut-être ensemble au bal, cela serait mieux. Surtout si ce bal nous réserve des surprises. »
Et par « surprises », Kira sous entendait danger. Mais pour le moment, elle avait beau observer les convives qui s'amusaient à retourner les objets, passer sous la nappes de la table, chercher dans les coins, recoins et piliers de la salle de réception, la Casteldragon ne voyait aucun danger. Juste quelques invités stupides et irréfléchis qui espéraient se précipiter dans la cour des grands. Mais la belle montdragonnière savait que l'impératrice n'était pas aussi stupide. Si elle avait organisé une chasse au trésor, c'était pour les « meilleurs » d'entre eux, et il allait falloir ruser.
« Bon, maintenant que nous sommes d'accord pour faire équipe, mettons nous au travail. » continua la Comtesse, puis, se tournant vers l'Aigle, elle continua : « Je proposais justement à ma collaboratrice féline de commencer par le grand hall, au lieu de s'attarder ici, étant donné que tous sont en train de tout saccager. Adhérez-vous à ma proposition ? Sinon… nous pouvons nous joindre au carnage de la pièce, bien sûr ! »
Sa proposition faite, la jeune femme se tourna vers Karîn et lui sourit tout en gardant son regard sombre et sérieux, lui signifiant de se taire quant au terme de « collaboratrice ». La Comtesse ne les avait pas présenté le moins du monde, et souhaitait que les deux femmes gardent leurs véritables noms secrets jusqu'à la fin des festivités. Elle se méfiait de tous, même du rapace qui s'était joint à elles.
Alors que ta discussion avec la comtesse commençait à prendre une forme de dramaturgie comique, entre la noble désirant par-dessus tout travailler en équipe avec sa seule « amie » ici, qui n’est d’autre que sa garde du corps qui ne pense qu’à faire regretter toute créature de nature humaine qui oserait approcher de trop près sa protégée. D’ailleurs, pendant que nous parlions, une créature correspondant au critère pour lequel tu étais en garde venait de vous approcher. Le bougre n’avait aucune honte à te prendre d’assaut dans le dos, et tu te retournes avec bien l’intention de lui en mettre pour avoir osé, déjà d’une car il t’avait prise par surprise, chose impensable, et surtout interdite, mais le pire de tout, il avait interrompu votre charmante discussion sur les choix de stratégies que vous étiez en train de mettre en place avec ta Dame préférée. Intolérable.
- Ce que je suspecte, monsieur, c’est que vous n’êtes pas…
Tu n’eus même pas la possibilité de finir ta phrase que Dame Kira avait déjà engagée la discussion avec l’homme au masque de vautour. Tu grinces des dents, tu es ici pour protéger Dame Kira des nuisibles dont tu n’as aucune connaissance, et la voilà qui se jette tête baissée vers eux. Tu soupires intérieurement en laissant les deux personnes discutaient, du moment, que cela ne reste qu’à la discussion courtoise. Puis soudainement, la discussion te retombe dessus, un peu comme un cheveu sur la soupe, avec la Comtesse qui te demande de ne pas l’abandonner, par peur des dangers possible. Tu rigoles légèrement, amusée par la naïveté dont pouvait faire preuve ta Dame dans une telle situation.
- - Ma Dame, malgré tout le respect que je vous dois, je peux vous assurer qu’à compter de maintenant, et jusqu’à ce que j’ai la preuve que cette mission ne soit pas dangereuse pour vous, vous n’aurez plus le droit à aucune vie privée, ni même à un moment d’intimité. je serai avec vous constamment.
Oui, tu étais du genre extrême, mais il fallait bien ça pour faire le travail que tu fais à tes yeux, et d’ailleurs, tu finis par tourner ton regard vers le vautour, qui doit surement se demander sur quelle bande d’hurluberlu il a bien pu tomber.
- - Quant à vous… Tu prends une petite seconde pour réfléchir. Mon amie a accepté que vous fassiez équipe avec nous, soit. Mais je vous ai à l’œil tant que je n’aurais pas la certitude que vous n’êtes pas un possible ennemi. J’espère que vous comprendrez.
Tu espérais sincèrement qu’il comprendrait, sinon… Tant pis pour lui.