Notre récit, donc, commence par un beau matin d'hiver 1224, dans une "paisible" bourgade Volgienne. Nous n'en dirons le nom car, depuis des années, il en a été oublié des habitants eux-mêmes. Ce petit bourg se trouve situé –s'il n'a pas été abandonné– aux abords de la Sombre Forêt de Volg, à bonne distance de Boisnoir, et est traversé par une modeste rivière qui servait, autrefois, à acheminer le bois qu'on y coupait. Mais en cet autrefois, les gens y coulaient des jours heureux et paisibles –du moins aussi paisibles que puisse le permettre la proximité de la Sombre Forêt– ce qui, à présent, n'est plus qu'un lointain souvenir. Au fil du temps, sa réputation aussi sombre que son atmosphère attira nombre de brigands et autres malfrats en sursis en recherche d'une cachette, ce qui transforma ce petit village de bucheron en un fantastique amas d'hors la loi. Et si tout cela se passa bien avant l'arrivée de notre principale préoccupation, il est nécessaire de l'aborder pour mieux appréhender la tournure des évènements.
En ces temps-là, le village était dirigé par un grand homme, bucheron de profession et bon vivant. Grand, il l'était, aussi bien de taille que de vertus, que l'on ventait bien volontiers. Lorsqu'il y avait besoin de bras supplémentaires, on allait naturellement chercher après cet homme ; lorsqu'on avait des problèmes, on cherchait aussi après lui ; et pour encore bien des choses, c'était encore cet homme qu'il fallait demander. Peut-être n'était-il pas aussi bon qu'il le laissait si facilement croire, comme chacun il devait avoir son lot de défauts plus ou moins grands, à commencer par l'avarice, mais il avait su enrichir l'endroit comme aucun de ses prédécesseurs n'y était parvenu, et surtout, il se préoccupait toujours de son prochain. Ça suffisait à contenter tout le monde, et personne ne regardait autre chose que ses bonnes actions. Cet homme, il s'appelait Pierre Finebaie, et je pense que vous voyez où j'en arrive.
A son arrivée quelques dix ans plus tôt, dans ce village, Pierre avait fait la connaissance d'une ravissante créature telle qu'il n'en avait jamais vu, aux cheveux d'or roux et aux yeux pâles. Ça avait été le coup de foudre ; quand bien même il était plus âgé qu'elle de quinze ans, qu'elle sortait tout juste de l'adolescence alors que lui-même était veuf ; et rapidement, le mariage des deux êtres eu lieu –non sans une certaine appréhension.
Son épouse devint une belle et douce femme pleine de charme et d'affection, aimée de chacun. Native de ce petit village, où s'était établie sa famille depuis deux générations, elle exerçait en tant qu'herboriste et guérisseuse, comme chaque femme de sa famille l'avait fait avant elle, mais aussi comme médiatrice lorsqu'il y avait des conflits entre les différents voisinages. Experte dans son domaine, elle servait également de sage-femme et s'avérait donc indispensable à la survie des villageois –et ces derniers avaient eu une peur atroce que ce grand gaillard n'emmène avec lui ce trésor. Cette créature dont la noblesse d'âme avait conquis le cœur de tous, y compris des vauriens lorsqu'ils firent leur apparition plus tard, avait pour prénom Valériane.
Celle-ci avait fait l'honneur de donner à son mari deux beaux enfants : Galène et Onyx, respectivement l'ainée et le cadet ; et portait en son sein leur troisième, celle qui serait prénommée, plus tard, Agathe. Toute la famille était enthousiaste pour la venue de l'enfant, qui devait se faire, normalement, aux prémices du printemps. Heureux en ménage autant qu'en affaire, vivant dans une maison relativement spacieuse pour leur condition, il ne leur manquait rien, à part peut-être un autre lieu de vie… Et surement auraient-ils du déménager dans une autre ville, sans quoi cette famille n'aurait connu le sort qui lui fut réservé, et que je m'en vais de ce pas vous narrer.